- 1. Sortie de crise accélérée dans l'Asie émergente
- 2. Lente convalescence dans les autres économies en développement
- 3. L'économie japonaise prise dans la trappe dépressive
- 4. L'inconnue américaine
- 5. Rebond conjoncturel et incertitudes structurelles en Europe
- 6. Le cycle du millénaire différé
- 7. Bibliographie
ÉCONOMIE MONDIALE 1999 : la fin des turbulences ?
L'inconnue américaine
L'économie américaine a poursuivi en 1999 sa croissance sur un rythme rapide, faisant de la phase d'expansion engagée en 1991 la plus longue jamais enregistrée aux États-Unis depuis l'établissement de comptes nationaux. Outre sa durée et son rythme, cette expansion se caractérise par une augmentation notable de la productivité du travail. Déjà perceptible dans les années 1980, celle-ci est devenue particulièrement nette à partir de 1995 (+ 2,5 par an selon les comptes nationaux révisés, au lieu de + 1,6 p. 100 sur la période 1983-1990 et + 0,7 p. 100 sur la période 1972-1981) et semble refléter la diffusion rapide des nouvelles technologies de l'information dans les différents secteurs de l'économie. Conjuguée au déclin continu du taux de chômage, revenu en novembre 1999 à 4,1 p. 100, soit son plus bas niveau depuis trente ans, et à l'absence de tensions inflationnistes, cette évolution alimente le discours sur l'émergence d'une nouvelle économie, caractérisée par des rendements croissants, une moindre sensibilité aux contraintes physiques de production et donc aux fluctuations cycliques de l'activité. Ainsi, le gouverneur de la Fed, Alan Greenspan, reconduit dans ses fonctions en février 2000 pour un quatrième mandat de quatre ans, n'a-t-il pas hésité à déclarer que l'accélération de la demande, plutôt que de traduire un état de surchauffe de l'économie, ne faisait que refléter le relèvement de la tendance de la productivité (Financial Times, 30 octobre 1999). Quant au déficit courant, qui pourrait dépasser 4 p. 100 du P.I.B. en 2000, il ne ferait que refléter le rendement accru des actifs américains et l'attrait que ce dernier exerce sur les capitaux du monde entier. Des propos semblables étaient tenus, faut-il le rappeler, par Milton Friedman, dans la première partie des années 1980.
Le resserrement des contraintes financières semble pourtant inéluctable. Après avoir tiré l'économie mondiale d'une récession jugée inévitable, l'économie américaine doit désormais composer avec une demande croissante de capitaux de la part de l'Europe et de l'Asie, où la croissance repart. La hausse, encore limitée, des taux longs enregistrée des deux côtés de l'Atlantique depuis le début de 1999 (plus un point en glissement annuel) pourrait bien annoncer ce retournement de l'environnement financier mondial. Dans ces conditions, le financement du déficit courant américain, qui dépasse les niveaux records de 1986-1987, risque de devenir rapidement problématique. S'il ne minore en rien l'appréciation des changements structurels en cours aux États-Unis, ce constat conduit à souligner en revanche l'ampleur des déséquilibres financiers qui accompagnent et peut-être rendent possible cette mutation. Le déficit extérieur, enregistré dans un contexte d'assainissement en profondeur des comptes publics, met en relief l'endettement vertigineux du secteur privé. Devenu négatif en 1998, le taux d'épargne des ménages a continué de chuter en 1999. La boulimie de dépense du secteur privé s'appuie à son tour sur les gains extraordinaires de Wall Street, qui pousse les ménages à s'endetter. Le relèvement des taux courts amorcé par la Federal Reserve Board (Fed) en 1999 (trois fois un quart de point) vise précisément à freiner la consommation, mais il ne peut être que très progressif compte tenu des risque d'effondrement de la Bourse, et par la même occasion, du dollar.
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Écrit par
- Jacques ADDA : maître assistant à l'université Bar-Ilan (Israël), département de sciences politiques et relations internationales
Classification
Média