ÉCONOMIE MONDIALE 2017 : expansion, inégalités, fragilités
Europe : une reprise nette et assez homogène
La zone euro connaît une période de croissance bien répartie entre les différents pays. Il est remarquable que la France, l’Allemagne et l’Italie connaissent des taux de croissance comparables ; l’écart entre les croissances allemande et italienne est divisé par deux (1,9 p. 100 en Allemagne et 0,9 p. 100 en Italie en 2016 ; respectivement 2 p. 100 et 1,5 p. 100 en 2017). La zone euro pâtit faiblement de l’appréciation de sa monnaie qui, après avoir été stable autour de 1,10 dollar en 2016, s’est nettement réévaluée, passant, entre le début et la fin de l’année 2017 de 1,05 à 1,20 dollar à l’automne.
Cette croissance profite du dynamisme du commerce mondial, de taux d’intérêt bas, de politiques budgétaires moins restrictives et de l’évolution favorable de la demande interne : le taux de chômage poursuit une décrue entamée depuis le pic de 2013 (10,9 p. 100) et passe au-dessous de 8 p. 100 (8,1 p. 100 en janvier ; 7,7 p. 100 en juillet 2017). Cette baisse contribue à soutenir la consommation des ménages et participe à la vitalité de la demande globale. Les réformes en Espagne, en Italie et en France, ainsi que le recul de l’euroscepticisme, ne sont pas étrangers à cette amélioration du climat économique. Pour le plus long terme, la croissance de la zone euro est freinée par une productivité insuffisante, le vieillissement de la population et la dynamique dangereuse des dettes privées et publiques.
En Allemagne, les bonnes performances économiques, avec un taux de croissance de 2 p. 100, un excédent budgétaire et un taux de chômage qui atteint son niveau le plus bas depuis la réunification (5,6 p. 100), s’accompagnent de signes inquiétants : des difficultés à faire face au déficit démographique, de nombreux emplois précaires, des inégalités très fortes, une productivité qui progresse insuffisamment, une perspective de mutation énergétique délicate et, enfin, une situation politique inhabituellement instable.
Concernant la France, l’année 2017 enregistre une amélioration sensible de nombre d’indicateurs, qu’il s’agisse de la production industrielle, du climat des affaires tel qu’il est ressenti par les chefs d’entreprise, des exportations (tourisme en particulier) et de l’emploi, qui poursuit sa progression (autour de 100 000 emplois créés par semestre dans le secteur privé marchand). L’effet sur le chômage est modeste mais réel : le taux de chômage (au sens du Bureau international du travail, BIT) passe au-dessous de 10 p. 100, pour la première fois depuis 2012.
Avec des taux de 1,5 p. 100 en 2017, après 0,9 p. 100 en 2016, l’Italie dépasse, pour la première fois depuis 2010, 1 p. 100 de croissance. L’emploi et l’investissement s’améliorent, mais les incertitudes politiques pèsent sur la gouvernance économique.
Pour la troisième année consécutive, l’Espagne enregistre un taux de croissance de plus de 3 p. 100, qui s’accompagne d’une consolidation de la situation des entreprises et du système bancaire. Le chômage poursuit une décrue entamée à la fin de 2013 mais reste à des niveaux très élevés (de l’ordre de 17 p. 100). Traumatisée par les attentats de Barcelone et Cambrils en août, l’Espagne est également confrontée à la crise née de la revendication d’indépendance de la Catalogne qui pourrait porter un coup à l’attractivité de la région la plus riche du pays.
Au Royaume-Uni, la dépréciation de la livre a marqué l’année 2017, la première de l’après-Brexit : au cours des neuf premiers mois, la livre est passée de 1,20 à 1,12 euro. Cette dépréciation a plus pesé négativement sur le pouvoir d’achat et la demande des ménages que positivement sur les exportations. La croissance a fléchi, passant de 2,2 p. 100 en 2015 à 1,8 p. 100 en 2016, puis 1,7 p. 100 en 2017, en décalage par rapport à celle[...]
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Écrit par
- Jean-Pierre FAUGÈRE : professeur émérite de sciences économiques, université Paris-Sud
Classification
Médias