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ÉCONOMIE RÉGIONALE ET URBAINE

De la formation des centres urbains

L' économie urbaine part de l'existence d'un centre-ville, mais ne l'explique pas. Comme on l'a vu, le centre-ville peut être le produit d'un long processus historique ; il reste, dans ce cas, à expliquer sa pérennité et le niveau d'activité qui y prévaut. L'urbanisation rapide des États-Unis s'est accompagnée de la création des Central Business Districts dont le rôle demeure considérable dans la vie économique américaine.

Pour comprendre la raison d'être des centres urbains, il faut se rappeler que les activités qu'ils regroupent ont beaucoup changé au fil du temps. Alors que le cœur des villes industrielles est souvent formé d'usines et d'ateliers, celui des villes postindustrielles est constitué de bureaux affectés au tertiaire. Les villes anciennes, quant à elles, conservent souvent des noyaux historiques importants complétés par des activités culturelles et récréatives – musées, théâtres, restaurants, cafés.

Ville et interactions sociales

Dans tous les cas de figure, il semble que le besoin d'interaction sociale constitue une des raisons d'être de ces centres. Martin Beckmann (1976) a étudié la formation d'un centre-ville dans un contexte où le bien-être des individus dépend de deux variables : la quantité de sol achetée sur le marché foncier et la distance moyenne aux autres membres de la collectivité, prise comme indicateur des interactions sociales. La première variable incite à l'étalement de la population, la seconde pousse vers un resserrement de celle-ci ; il y a donc tension entre ces deux forces. À l'équilibre résidentiel, les individus se répartissent selon une densité en forme de cloche, dont la partie supérieure a la nature d’un centre-ville, puisque la consommation de sol y est relativement faible mais l’accessibilité moyenne très élevée. De nouveau, la rente foncière décroît au fur et à mesure qu’on s’écarte de ce centre : il y a échange entre surface de logement et accessibilité moyenne. La ville joue ici le rôle d'un aimant social, agglomérant les individus autour d'un centre où la densité de population est la plus élevée. Le sommet de la cloche est d'autant plus haut que la taille de la population est grande, car les gains engendrés par les interactions sociales augmentent avec la taille de la population ; en revanche, il s'abaisse quand le coût de transport entre les individus diminue, car, alors, le coût de la distance entre individus diminue. On peut donc raisonnablement spéculer que la généralisation d’Internet et des nouveaux modes de communication va accentuer l’étalement urbain. Ces conclusions sont donc les mêmes que celles qu’ont obtient dans le cas du modèle de la ville monocentrique, où le centre-ville est donné par hypothèse.

Dans la même perspective, une contribution plus fondamentale, en ce que les variables clés sont indépendantes du système économique retenu, est due à Yorgos Papageorgiou et Terry Smith (1983). Ces auteurs considèrent l'arbitrage entre le besoin de contact social, négativement affecté par la distance, et le besoin d'espace, négativement affecté par l'augmentation du nombre d'habitants. Les préférences sont telles que la distribution uniforme des individus sur un territoire sans frontière est initialement un équilibre spatial. Lorsque la propension à interagir entre individus augmente suffisamment, cet équilibre devient instable : une perturbation marginale suffit à faire évoluer la population vers une distribution irrégulière admettant des pointes et des creux. Les villes sont ainsi considérées comme la résultante d'un processus social combinant des besoins fondamentaux de l'être humain qui ne s'expriment pas ou pas nécessairement au travers des marchés.

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Écrit par

  • : ancien professeur d'économie à l'École nationale des ponts et chaussées

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Média

Pittsburgh (États-Unis) - crédits : Bettman/ Getty-Images

Pittsburgh (États-Unis)

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