Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

PIAF ÉDITH (1915-1963)

S'il est des voix qui savent chanter l'âme de leur peuple, Édith Piaf est de celles-ci. Plus qu'une artiste de variété, elle a fini par se confondre avec la légende qu'elle contribua elle-même à alimenter. Véritable personnage d'une chanson réaliste, elle aura tout connu : la rue, la misère, la violence, l'alcool, la drogue, la prostitution, les amours tragiques, la maladie et une gloire immense.

Professionnelle accomplie, elle a appris à reconnaître les chansons qui, grâce à sa voix naturelle venue du plus profond de son être, l'ont fait entrer dans le cœur du peuple. Elle a conféré une dimension nouvelle à la chanson réaliste, dont elle a perpétué la tradition illustrée avant elle par Eugénie Buffet, Damia ou Fréhel. Elle a choisi parmi ses prétendants ceux dont le talent était certain et n'a jamais hésité à leur offrir sa propre notoriété pour les amener vers le public. Elle a su mettre en scène ses tours de chant mais aussi son existence désordonnée.

La Môme Piaf

Édith Giovanna Gassion naît le 19 décembre 1915 à Paris, à l'hôpital Tenon, mais la légende voudrait qu'elle ait vu le jour sur un trottoir de la rue de Belleville, face au numéro 72. Sa mère, Anita Maillard, dite Line Marsa, d'origine italo-kabyle, chanteuse, alcoolique, est incapable de prendre soin de sa fille. Son père, Louis Gassion, acrobate antipodiste, est mobilisé et ne peut s'occuper de son enfant. Édith passe ses premiers mois à Barbès, chez Aïcha, sa grand-mère maternelle, qui la nourrit de biberons de vin rouge. Elle rejoint sa grand-mère paternelle, tenancière d'une maison close à Bernay, en Normandie, et y reste plusieurs années, choyée par les prostituées et nourrie à sa faim. Vers l'âge de huit ans, victime d'une kératite, elle perd momentanément la vue. La grand-mère emmène ses « filles » et Édith prier sur la tombe de sainte Thérèse de Lisieux et, huit jours plus tard, l'enfant recouvre la vue. Toute sa vie, Édith Piaf gardera la médaille de la sainte autour du cou.

Elle devient, à l'âge de douze ans, la partenaire de son père et quête après ses spectacles de rue. Trois ans plus tard, en compagnie de Mômone – Simone Berteaut, sa sœur « adoptive » –, elle chante dans les rues. À dix-sept ans, elle a une fille, Marcelle, qui mourra deux ans plus tard d'une méningite foudroyante.

En 1935, Louis Leplée, directeur du Gerny's, un cabaret situé rue Pierre-Charron, tout près des Champs-Élysées, l'entend chanter au coin de la rue Troyon, dans le XVIIe arrondissement. Il lui propose son premier contrat, la baptise la Môme Piaf et l'introduit auprès du Tout-Paris. En décembre de la même année, elle enregistre chez Polydor et donne ses premières interviews à la radio.

Leplée, prince interlope des nuits parisiennes, est assassiné en 1936 ; Édith Piaf est placée quarante-huit heures en garde à vue. Son ascension est stoppée. Jacques Canetti, à l'origine de ses premiers passages sur les ondes de Radio-Cité, lui trouve des engagements à Paris et en province, et arrange la rencontre avec Raymond Asso, qui va devenir son Pygmalion. Asso écrit pour elle des textes mis en musique par Marguerite Monnot et prend sa carrière en main. Trois ans après leur rencontre, il est appelé sous les drapeaux. Leur association est terminée. Il l'a sortie du milieu malsain dans lequel elle a grandi, lui a appris son métier de chanteuse et lui a redonné son prénom.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Média

Édith Piaf et Marcel Cerdan - crédits : Keystone/ Getty Images

Édith Piaf et Marcel Cerdan

Autres références

  • ARRANGEURS DE LA CHANSON FRANÇAISE

    • Écrit par
    • 7 929 mots
    • 3 médias
    ...Line Renaud (Ma cabane au Canada)ainsi qu’à Bourvil (La Tactique du gendarme). Guy Luypaerts (1917-2015) utilise tous les pupitres de l’orchestre pour Édith Piaf (La Vie en rose en 1947) ou plus tard, dans les années 1950, pour Charles Trenet (Moi, j’aime le music-hall, Nationale 7).
  • AZNAVOUR CHARLES (1924-2018)

    • Écrit par
    • 1 586 mots
    • 1 média

    Maurice Chevalier a dit de lui : « Il a osé chanter l'amour comme on le ressent, comme on le fait, comme on le souffre. » Pourtant le chemin fut long et difficile et, avant de connaître une gloire internationale, Charles Aznavour a bien failli subir l'échec définitif magnifiquement décrit dans « Je...

  • MONTAND YVES (1921-1991)

    • Écrit par
    • 1 450 mots
    ...nouveau dans le Midi de la France. S'ouvre alors pour lui le succès des salles parisiennes : l'ABC, Bobino, les Folies-Belleville et le Moulin-Rouge, où il rencontre Édith Piaf. Piaf n'est pas seulement sa maîtresse passionnée : elle se charge surtout d'un rôle très efficace de Pygmalion féminin qui lui enseigne...
  • MOUSTAKI GEORGES (1934-2013)

    • Écrit par
    • 1 094 mots
    • 1 média

    Chanteur de langue française s'il en est, l'auteur-compositeur d'origine grecque Georges Moustaki a écrit de nombreuses chansons inspirées de ses racines méditerranéennes et de ses voyages à travers le monde. Dans Petit Abécédaire d'un amoureux de la chanson française (2012),...