PIAF ÉDITH (1915-1963)
Et ma vie recommence avec toi...
Désormais sa carrière s'articule entre Paris et New York. Lors de son quatrième voyage aux États-Unis, elle enregistre sur place, en anglais, Autumn Leaves – Les Feuilles mortes – et Don't Cry – C'est d'la faute à tes yeux –, deux adaptations de son amant du moment, l'Américain Eddie Constantine, qu'elle imposera en France. En 1952, elle épouse Jacques Pills à l'hôtel de ville de New York ; Marlene Dietrich est leur témoin. Le mariage ne tiendra que trois ans. Malgré les efforts de Pills, Édith ne parvient pas à se séparer de ses démons.
Elle est sollicitée par les auteurs et les compositeurs de toutes les générations, entre autres Charles Aznavour, qui a été son secrétaire, et Gilbert Bécaud. Sa carrière est alors au sommet. Elle tourne avec Sacha Guitry dans Si Versailles m'était conté (1953), avec Jean Renoir dans French Cancan (1954) ; en 1956, elle est couronnée par la presse américaine au Carnegie Hall de New York.
En 1958, elle sauve l'Olympia de Bruno Coquatrix en restant trois mois à l'affiche. Georges Moustaki entre dans sa vie et lui écrit Milord, sur une musique de Marguerite Monnot, toujours fidèle. Cette chanson fera le tour du monde et se classera parmi les meilleures ventes dans plusieurs pays d'Europe. Malgré son immense succès, Édith Piaf continue de se consumer dans l'enfer de la drogue et de l'alcool. Son appartement parisien du boulevard Lannes, près du bois de Boulogne, est un laboratoire de chansons. Mais il est aussi le lieu de soirées de débauche où se bousculent amis, créateurs et parasites. Au début des années 1960, Charles Dumont lui apporte ses derniers grands succès : Mon Dieu et, surtout, Non, je ne regrette rien, une chanson qui rencontre l'histoire lorsque les putschistes d'Alger la chantent au moment de leur reddition en avril 1961.
En 1961, Édith Piaf rencontre un jeune coiffeur grec, Theophanis Lamboukas, qu'elle rebaptise Théo Sarapo, sarapo signifiant « je t'aime » en grec. Il est d'abord son secrétaire puis son manageur, avant de devenir son époux en octobre 1962. Ils enregistrent en duo et chantent ensemble À quoi ça sert l'amour ?, à Bobino et à l'Olympia. Elle lui demande même d'apparaître torse nu sur scène.
Le public vient voir les derniers éclats d'une étoile mourante et lui offre des ovations qui dépassent vingt minutes. Elle se prête aux jeux des tabloïdes qui exploitent ses faiblesses et sa souffrance. Elle meurt le même jour que son grand ami Jean Cocteau, le 11 octobre 1963. Elle ressemble à une vieille femme : elle n'a pourtant que quarante-huit ans. L'Église, qui a refusé de reconnaître son divorce, la prive d'enterrement religieux, et Rome la qualifie « d'idole du bonheur préfabriqué ». Mais ses obsèques au cimetière parisien du Père-Lachaise n'en attirent pas moins une foule considérable, prête à tous les excès pour lui rendre hommage.
Depuis lors, aucune artiste n'a su autant investir le cœur du public français. Le cinéma n'a pas tardé à s'emparer de ce personnage mythique, comme en témoignent Piaf, de Guy Casaril (1974), Édith et Marcel, de Claude Lelouch (1983), La Môme, d'Olivier Dahan (2007). Autre preuve de la pérennité de son art, un coffret de vingt disques compacts – Édith Piaf. L'Intégrale – comportant 413 titres, parmi lesquels sept inédits ainsi que les concerts tenus au Carnegie Hall de 1956 et 1957 a été publié par E.M.I. en 2007.
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