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ÉDITION DU GÉNOME HUMAIN

Les réactions institutionnelles

Les réactions institutionnelles après le sommet de Washington ne tardent pas : en octobre 2015, un mois après que le Hinxton Group – un réseau international de généticiens et de bioéthiciens, principalement britanniques et nord-américains – a mis en garde les pouvoirs publics contre des réglementations trop restrictives et souligné la nécessité de poursuivre les recherches sur l’édition du génome germinal humain, l’UNESCO communique sa position. Son Comité international de bioéthique (CIB) rend un rapport très critique sur « le génome humain et les droits de l’homme » dans lequel il encourage les États à se mettre d’accord sur « un moratoire portant sur l’ingénierie du génome de la lignée germinale chez l’homme aussi longtemps que la sécurité et l’efficacité des procédures ne soient pas établies comme moyen de traitement ». Déjà, en 1997, dans la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l’homme, l’organisme international soulignait que le génome « sous-tend l’unité fondamentale de tous les membres de la famille humaine » et qu’il est « le patrimoine de l’humanité ». À l’époque, les craintes concernaient surtout le clonage reproductif que la Déclaration jugeait dans son article 11 « contraire à la dignité humaine ». L’UNESCO actualise ainsi sa réflexion sur la génétique : estimant que le génome n’est pas « une matière première malléable à loisir », le CIB appelle à un moratoire des recherches portant sur le génome germinal dans l’attente de l’établissement d’une norme globale et partagée qui découlerait de l’esprit de la Déclaration de 1997.

Le CIB fait aussi référence à la Convention d’Oviedo (1997), signée par la plupart des pays membres du Conseil de l’Europe. Son article 13 énonce : « Une intervention ayant pour objet de modifier le génome humain ne peut être entreprise que pour des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques et seulement si elle n’a pas pour but d’introduire une modification dans le génome de la descendance. » La convention est à l’heure actuelle le seul instrument juridique international qui soit contraignant pour les États qui l’ont signée et ratifiée. La France l’a ratifiée par la loi sur la bioéthique de juillet 2011. Le 12 octobre 2017, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a voté une recommandation non contraignante stipulant que « la modification intentionnelle de la lignée germinale humaine franchirait des limites jugées éthiquement inviolables ». Les États membres sont invités à ouvrir un débat public et à développer un cadre réglementaire et législatif commun. L’esprit de la Convention d’Oviedo est donc réaffirmé.

Sur un plan national, des instances chargées de réfléchir aux orientations de la santé publique ont aussi pris position. On se contentera de citer ici le Nuffield Council on Bioethics (NCB) pour le cas britannique et la National Academy of Sciences (NAS) pour les États-Unis, parce qu’ils tranchent avec la réserve de l’UNESCO et du Conseil de l’Europe. En septembre 2016, le NCB rend un rapport sur l’édition du génome dans lequel il se déclare prudemment favorable aux recherches sur l’édition du génome humain, y compris germinal, de manière à en explorer les applications potentielles. Cette recommandation confirme la décision prise quelques mois plus tôt, en février 2016, par l’autorité britannique de régulation en embryologie (HFEA : Human Fertilisation and Embryology Authority), autorisant la première expérimentation menée au Royaume-Uni sur l’édition du génome des embryons, qui sera finalement réalisée en septembre 2017. Le NCB annonce la publication d’un autre rapport sur l’édition du génome et la reproduction humaine qui devrait confirmer cette orientation. Aux États-Unis, la NAS a rendu un[...]

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Écrit par

  • : docteur en sociologie, professeur des Universités à l'université Lumière-Lyon-II, chercheur au Centre Max Weber (CNRS Lyon)

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Médias

Complexe CRISPR-Cas9 - crédits : Janet Iwasa for the Innovative Genomics Institute. Copyright 2018 The Regents of the University of California

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Mode d’action de CRISPR-Cas9 - crédits : Encyclopædia Universalis France

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