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LEACH EDMUND RONALD (1910-1989)

Élève de Malinowski et de Radcliffe-Brown, Edmund R. Leach, directeur de recherche à King's College à Cambridge et membre du Center for Advanced Studies in Behavioral Sciences à Stanford, manifesta très tôt son indépendance à l'égard de ses maîtres. S'il se dit structuraliste, ce n'est ni à la manière de Radcliffe-Brown ni à celle de Lévi-Strauss. S'il se dit dynamiste, ce n'est pas non plus à la manière de Gluckman. Enfin, il ne sera jamais question chez lui du fonctionnalisme, sinon pour s'y opposer. Par ailleurs, Leach se montra toujours très réservé à l'égard du comparativisme, tant lui paraît grand l'arbitraire de celui qui choisit les critères de différenciation. Cet anthropologue se veut donc rigoureusement original. Son humour agressif a beaucoup fait pour le rendre à la fois attirant et insupportable aux yeux de bien des ethnologues contemporains.

C'est autour de deux ouvrages majeurs et d'un recueil d'articles que s'organise la pensée socio-anthropologique d'Edmund Leach. Son premier grand ouvrage, Political Systems of Highland Burma. A Study of Kachin Social Structure (1954 ; trad. A. Guérin, Les Systèmes politiques des hautes terres de Birmanie. Analyse des structures sociales kachin, Paris, 1972), propose une théorie dynamique de l'anthropologie sociale. Leach rejette la notion selon laquelle la structure sociale devrait être appréhendée comme un système de relations visant à l'équilibre. Pour lui, au contraire, la réalité empirique de l'organisation sociale ne peut être comprise qu'à partir des contradictions fondamentales que manifeste la rivalité ou la compétition politique pour le pouvoir. La structure des idées politiques doit, bien entendu, être distinguée très clairement de la structure de faits politiques, que l'on peut observer empiriquement. Leach, dans cet ouvrage qui eut un grand retentissement et donna lieu à de dures polémiques, réexamine la question de savoir dans quelle mesure un modèle d'équilibre peut être efficacement utilisé pour rendre compte d'un processus historique.

Le second grand ouvrage de Leach, Pul Eliya. A Village in Ceylan. A Study of Land Tenure and Kinship (1961), examine une communauté du centre-nord de Ceylan qui vit encore selon un système agricole fondé sur l'irrigation mise en place entre le ~ iiie et le xiie siècle. Il décrit dans le détail les processus d'appropriation de la terre et les modalités de sa transmission en relation avec les liens de parenté ainsi qu'avec la stratégie matrimoniale.

Rethinking Anthropology (1961 ; trad. D. Sperber et S. Thion, Critique de l'anthropologie, Paris, 1968) est sans doute l'ouvrage le plus polémique de Leach. C'est un recueil d'articles dont le plus percutant, qui donne le titre à l'ouvrage, règle leur compte aux fonctionnalistes et aux élèves de Radcliffe-Brown, « collectionneurs de papillons anthropologiques » et typologistes maniaques.

L'étude que Leach fit paraître en 1970 sur Claude Lévi-Strauss (trad. D. Verguin, Paris, 1970) a eu le mérite de mettre au clair les oppositions fondamentales qui existent entre les deux maîtres. Au structuralisme antiempiriste de Lévi-Strauss, Leach oppose un structuralisme prudent, fondé d'abord sur la recherche empirique. Ce structuralisme, que l'on pouvait qualifier de limité, s'apparente assez à celui de Georges Dumézil. Leach publie également, en 1976, Culture and Communication. Un recueil de ses principaux articles, L'Unité de l'homme et autres essais, est paru en France en 1980.

— Raymond ECHES

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Écrit par

  • : assistant à l'U.E.R. des lettres et sciences humaines de l'université de Nice

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