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MILLAY EDNA ST. VINCENT (1892-1950)

Figure emblématique des années 1920, au cours desquelles elle fut sans doute la plus célèbre poétesse des États-Unis, Edna St. Vincent Millay devait rejeter, avant même la fin de cette période, l'image d'elle que l'on conserve encore le plus souvent aujourd'hui : celle d'une égérie de la bohème de Greenwich Village, à la vie sentimentale chaotique, jetant sur l'amour et le siècle un regard plus cynique et désabusé que « libéré ». Ses quatre vers les plus célèbres (First Fig) chantent la chandelle allumée aux deux bouts d'une jeunesse bien remplie, projetant une lumière brève mais exquise. Ils figurent dans son second recueil, A Few Figs from Thistles, paru en 1920, et disent assez par leur paradoxe d'une forme classique liée à l'expression d'une sensibilité fervente et neuve les tensions habitant cette sonnetiste talentueuse dont on a pu dire judicieusement qu'elle était très « contemporaine », mais assez peu « moderne » (Stephen Spender).

Née dans le Maine en 1892, Edna St. Vincent Millay publia tôt dans St. Nicholas, un magazine pour enfants, ses premiers poèmes. Le monde de son enfance, passée en compagnie de sa mère divorcée et de ses sœurs à Camden, au milieu d'une belle campagne proche de la côte Atlantique, devait durablement marquer son œuvre. C'est le poème Renascence, publié en 1912 dans The Lyric Year, qui attira sur elle l'attention. Il donna son titre à son premier volume, Renascence and other Poems (1917). Étudiante à Vassar, elle écrivit d'abord des nouvelles sous le pseudonyme de Nancy Boyd et fit, un temps, partie de la troupe des Provincetown Players. En 1923, elle épousa un homme d'affaires, Eugène Boissevain, et vécut avec lui dans les Berkshires jusqu'à la mort de ce dernier en 1949.

Ses autres œuvres poétiques comprennent Second April (1921) où se déploie son amour de la nature dans des textes d'une précision peu commune et surtout The Harp Weaver (1923), recueil aux résonances merveilleuses qui lui valut le prix Pulitzer en 1923. Trois autres recueils postérieurs retiennent aussi l'attention : The Buck in the Snow (1928), de tonalité plus sombre, Fatal Interview (1931), où triomphe la forme du sonnet, et Wine from These Grapes (1934).

Poète, Edna St. Vincent Millay fut aussi dramaturge. Trois pièces parurent en 1923 : Two Slatterns and a King, The Lamp and the Bell et Aria da Capo. On lui doit également le livret d'un opéra de Deems Taylor représenté au Metropolitan en 1927 et qui remporta un immense succès : The King's Henchman.

Edna St. Vincent Millay fut l'amie de plusieurs célébrités littéraires de la période (Witter Bynner, Floyd Dell, Arthur Davison Ficke, John Reed, Edmund Wilson...) et participa de près à la vie militante féministe et progressiste de la décennie. Après son arrestation, en compagnie de John Dos Passos, pour avoir manifesté contre le procès de Sacco et Vanzetti, elle quitta définitivement New York. Sa santé et son équilibre nerveux ne devaient alors cesser de se détériorer. Elle ne survécut à Eugène Boissevain qu'une année et succomba à une crise cardiaque le 18 octobre 1950.

— Marc CHÉNETIER

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, professeur de littérature américaine à l'université d'Orléans

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