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ÉDUCATION Types et fins de l'éducation

Prise dans la perspective que l'on va adopter, l'éducation est au fondement même de toute société. On traitera ici, non pas de n'importe quel processus de développement et de perfectionnement des individus sous l'action d'autrui, mais seulement de ce processus lorsqu'il met en jeu des adultes à titre d'éducateurs et des êtres non encore adultes à titre d'éduqués. Il y a déjà éducation chez l'animal, à des degrés divers, certes, selon les espèces, avec pour résultat une meilleure ou une plus rapide adaptation au milieu, mais chez l'homme les capacités éduquées permettent, au-delà d'une adaptation, une transformation du milieu lui-même ; en outre, non moins spécifiquement humaine est la continuité sociale, qui ne saurait être sans que chaque génération soit, d'une certaine manière, façonnée par la précédente : l'éducation transforme les êtres instinctifs et indifférenciés à la naissance en membres de telle société, capables de contribuer à sa subsistance ou à son développement, par tels savoir-faire, et sachant y établir des rapports sociaux en fonction de tels schémas.

L'éducation non institutionnalisée

Qui dit éducation ne dit pas nécessairement institution éducative. La famille, tout d'abord, sous des formes diverses – du moins son segment mère-enfant, mais souvent plus largement – est presque toujours le lieu de la première éducation : apprentissage des savoir-faire élémentaires dont certains sont innés chez l'animal mais acquis chez l'homme, forme donnée aux rapports perceptifs et actifs avec les objets et les êtres les plus proches, intégration progressive de coutumes et d'interdits. Même à ce niveau, on sait combien sont divers les rôles respectifs du père, de la mère, et d'autres membres de la parenté (M. Mead) et comment les façons de se comporter avec le tout petit enfant peuvent varier de la grande douceur à l'agressivité en passant par la quasi-indifférence. R. Benedict avait mis au point un guide détaillé d'étude de cette première éducation, qui n'a pas donné lieu finalement dans les pays développés à une analyse comparative aussi étendue qu'elle aurait pu l'être ; mais la diversité est certaine et, depuis deux générations, la tendance au changement de ces relations ne l'est pas moins.

L'acquisition de savoir-faire plus complexes, ainsi que de modes de relations plus élaborés, a longtemps eu lieu, elle aussi, sans institutions spécifiques : associé progressivement aux travaux des adultes de son sexe, le jeune apprenait à les accomplir ; mêlé à toute leur vie quotidienne, il apprenait aussi à se conduire avec les uns et les autres en fonction de leur statut. C'est probablement dans le domaine du sacré qu'on peut à juste titre parler d'institutions éducatives dans les sociétés archaïques : confréries de classes d'âge, périodes d'initiation se déroulant dans un lieu particulier, sous la direction d'hommes spécialisés. Tout autant que la division du travail, l'éducation comme fonction différenciée commence là.

C'est précisément avec la division du travail que se développe une fonction éducative spécialisée, avant même que se crée une institution ad hoc : il est un stade où ni les parents ni les groupes quelque peu indifférenciés ne peuvent transmettre des savoir-faire qui sont devenus trop complexes pour être partagés par tous. L'apprentissage auprès d'un maître constitue à certains égards une préfiguration de l'école ; mais, dans de très nombreux cas, celui-là coexiste avec celle-ci, différenciant radicalement le type d'enfance vécue et le type d'éducation reçue selon la couche sociale à laquelle on appartient.

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