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EDVARD MUNCH, L'ŒIL MODERNE (exposition)

Le début de carrière du peintre norvégien Edvard Munch (1863-1944) date des années 1880. Séjournant à Paris et à Berlin, il a acquis une réputation européenne avant 1914. Une nouvelle exposition au Centre Georges-Pompidou à Paris (21 septembre 2011 - 23 janvier 2012), avec pour commissaires Angela Lampe et Clément Chéroux, tend à montrer que son image d'artiste solitaire et tourmenté n'était qu'une idée reçue. Cette approche différente de l'œuvre met en évidence tout ce qui, en elle, résulte d'un « œil moderne ».

Tout en étant peu présent dans les manuels d'histoire de l'art du xxe siècle, Edvard Munch est loin d'être méconnu en France. Entre 1889 et 1913, ses tableaux furent exposés à sept reprises sur les cimaises du Salon des indépendants. Lors de l'Exposition universelle de 1937, le pavillon de la Norvège en fit une gloire officielle. Fin janvier 1944, sa mort ne manqua pas, en pleine guerre, d'être annoncée dans les journaux, tandis que les Allemands n'en étaient informés qu'en 1946. Depuis 1952, date d'une exposition mémorable qui lui fut consacrée au Petit Palais, ses toiles, ses lithographies et gravures n'ont cessé d'être présentées au public français.

Cette fois, l'intention affirmée des deux conservateurs en charge de l'exposition au Centre Georges-Pompidou a été d'estomper l'image d'un peintre souvent assimilé au symbolisme européen. Selon eux, Munch est bien plutôt un artiste « moderne » du xxe siècle, les trois quarts de ses tableaux ayant été exécutés entre 1900 et 1944. C'est ce peintre-là, contemporain de Kandinsky et de Picasso beaucoup plus que de Gauguin et de Van Gogh, qui nous est montré.

Munch a su engranger au bénéfice de son pouvoir de création les conquêtes techniques du xxe siècle pour, à travers ses propres problèmes existentiels, mettre en cause ce qu'était sa figuration antérieure du réel. Il en serait arrivé, grâce à cette appropriation, à structurer différemment l'espace visuel de ses œuvres.

Le début de l'exposition plonge le visiteur dans l'univers de Munch marqué par l'angoisse, la mélancolie, la maladie, la mort, des thèmes universellement vulgarisés par Le Cri, toile qu'il a peinte à Berlin en 1893 (et qui n'était pas présente dans l'exposition). Ces thématiques seront reprises par la suite : on compte six versions de L'Enfant malade de 1886 à 1925, sept des Jeunes Filles sur le pont entre 1901 et 1927. Munch répète des sujets dont il a une hantise et il les traite en fonction de situations psychologiques variant selon les époques.

Vient ensuite la facette d'un Munch moins familier, celle du praticien actif de la photographie. Il appartenait à la génération d'Émile Zola, qui s'efforça d'enrichir sa saisie du réel grâce à cette invention. Dans sa peinture, l'influence de la photographie passe par l'illusion que, chevaux en plein galop ou groupe de travailleurs sortant de leur usine, les personnages s'avancent droit sur vous, comme pris sur le vif.

Munch a également été attentif aux études sur les rayons solaires, les rayons X, la radioactivité. Sous cette influence, sa manière de peindre a changé. Ses tableaux sont traversés de forces qui tendent à dissoudre les formes, à provoquer une ondulation de la matière. Ils semblent être la projection de visions irradiantes, comme dans Le Soleil (1910-1913).

Séduit par le cinéma, Munch aimait à se servir d'une caméra. L'exposition permet de voir l'un de ses films : scènes urbaines, modèles féminins évoluant dans son atelier, autoportraits. Illustré par ces séquences de quelques minutes, son intérêt pour la vie extérieure et la réalité sociale est, en parallèle, confirmé par les sujets de plusieurs tableaux : incendie à Oslo, manifestation ouvrière, bagarres[...]

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