GIBBON EDWARD (1737-1794)
Issu d'une famille aisée, Edward Gibbon perd sa mère en 1747 et est confié aux soins d'une tante qui se charge de son éducation. Sa jeunesse, maladive, difficile, est tout entière consacrée à la lecture, et sa vocation est précoce. Il note, dans ses Mémoires, que, dès l'âge de douze ans, il avait découvert sa propre voie, l'histoire. Jeune, il était déjà fort indépendant dans ses goûts et dans ses études, et il garda par la suite le caractère de chercheur solitaire. Son œuvre est ainsi due à son propre génie, et elle est marquée, d'un bout à l'autre, par le sceau de sa puissante personnalité. Envoyé dans un collège d'Oxford en 1752, à l'âge de quinze ans, il n'y trouve pas l'aide ni les soins qu'il pouvait souhaiter. En 1753, à Londres, à la suite d'une crise de conscience, il se convertit au catholicisme. Son père, courroucé, l'envoie à Lausanne où il est confié à la surveillance d'un ministre calviniste, le révérend Daniel Pavillard. Auprès de cet homme rigoureux mais savant, il peut parfaire sa culture et acquérir une excellente connaissance de la langue et de la littérature françaises. À la fin de 1754, Gibbon abjure sa nouvelle foi et revient au protestantisme. Rentré en 1758 en Angleterre, il publie en 1761 son premier ouvrage en français, Essais sur l'étude de la littérature, qui paraît en anglais en 1764. En 1763, Gibbon avait vécu quelque temps à Paris, où il avait fait la connaissance de Diderot et de D'Alembert. L'année suivante, il traverse les Alpes, arrive à Rome, où il prend un contact direct avec la ville, visite aussi Naples. Son père meurt en 1770, avant qu'il n'ait trouvé, à l'intérieur de l'histoire, son sujet précis de recherche. Mais peu après, installé à Londres, Edward Gibbon décide de se consacrer à l'histoire romaine, qui va occuper le reste de son existence. Sa vie d'écrivain se double d'une existence mondaine dans les cercles londoniens.
En 1776 paraît le premier volume de The History of the Decline and Fall of the Roman Empire. Aussitôt, il rencontre le succès, mais suscite aussi le scandale par la façon, jugée par beaucoup désinvolte, avec laquelle il a traité des origines du christianisme. Malgré les attaques, souvent injustes et vives, auxquelles il sait répondre par des apologies raisonnées, il poursuit son œuvre et, en 1781, paraissent le deuxième et le troisième volume de son Histoire, qui l'amènent jusqu'à la fin de l'Empire d'Occident. En 1788 sont publiés les trois volumes qui couronnent son œuvre. Il revient à Lausanne pour écrire ses Mémoires et retourne en 1793 à Londres, où il meurt l'année suivante.
Gibbon apparaît aujourd'hui comme un brillant historien de l'Antiquité romaine. L'œuvre qu'il a consacrée à l'Empire romain demeure encore vivante. La période qu'il a envisagée s'étend du iie siècle de l'ère chrétienne à la chute de Constantinople (1453). Elle se divise en deux, la coupure étant marquée par la fin de l'Empire d'Occident, vers 480. L'unité de l'ouvrage est assurée par la conception d'ensemble de Gibbon : pour lui, la décadence romaine se poursuit de façon continue de la fin de l'âge d'or des Antonins à la chute de l'Empire de Byzance. Gibbon connaît toutefois mieux les sources latines que les sources grecques, et cela explique les omissions et les insuffisances que l'on peut noter dans la seconde partie de son œuvre. Participant au mouvement philosophique et critique du siècle des Lumières, il traite de la naissance et du développement du christianisme en des chapitres demeurés célèbres et qui témoignent d'un libéralisme sceptique à l'égard de la religion. Louanges et attaques proviennent, selon les cas, de cette attitude. Son génie lui[...]
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Écrit par
- Raymond BLOCH : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
Classification
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DÉCADENCE
- Écrit par Bernard VALADE
- 9 945 mots
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