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TELLER EDWARD (1908-2003)

Physicien américain . Né le 15 janvier 1908 à Budapest (Hongrie), dans une famille de la bourgeoisie juive, Edward Teller commence des études supérieures à l'institut de technologie de Budapest, puis étudie la chimie à Karlsruhe (Allemagne), avant de rejoindre l'université de Munich et d'y étudier la mécanique quantique sous la direction d'Arnold Sommerfeld. C'est finalement à Leipzig, sous la direction de Werner Heisenberg, qu'il soutient sa thèse de doctorat en 1930. Il fuit l'Allemagne nazie et se réfugie au Danemark en 1933, où il côtoie Niels Bohr et de nombreux visiteurs, dont le physicien russe Lev Landau (1908-1968) avec lequel il étudie la théorie moléculaire de la dispersion sonore. Il séjourne ensuite une année au Royaume-Uni, enseignant la mécanique quantique au University College de Londres.

Avec Hermann Jahn, il démontre que, dans une molécule polyatomique, deux configurations électroniques ne peuvent avoir la même énergie si les atomes ne sont pas tous alignés. On appelle ce phénomène l'effet Jahn-Teller. En 1935, Teller est nommé professeur à l'université George-Washington à Washington. Avec un étudiant hongrois Stephen Brunhauer et le physico-chimiste Paul Emmet, il développe la théorie de l'adsorption de plusieurs couches de molécules par un solide ; cette contribution sera importante pour la compréhension de la catalyse. Avec son collègue et ami George Gamow, il développe la théorie de l'interaction nucléaire faible proposée par Enrico Fermi, en montrant qu'une désintégration bêta peut modifier d'une unité le moment angulaire intrinsèque (le spin) d'un noyau. Des désintégrations de ce type seront observées après cette prédiction ; elles sont maintenant appelées transitions de Gamow-Teller.

Toutefois, ce ne sont pas seulement les contributions scientifiques de Teller qui ont fait de lui un personnage d'importance historique. En effet, dès 1939 il fait partie de la poignée de physiciens qui, autour d'Enrico Fermi, de Leo Szilard et d'Albert Einstein, informent les autorités politiques américaines sur les capacités militaires des phénomènes de fission nucléaire et les alertent sur leur possible utilisation par les nazis. Nommé professeur à l'université Columbia de New York, il collabore avec Fermi, Szilard et Eugene Wigner sur le projet qui devait aboutir en 1942 à l'observation des premières réactions en chaîne dans un réacteur nucléaire. Il entretient également des relations étroites avec le groupe d'Harold Urey qui développe la première méthode de séparation des isotopes d'uranium, indispensable à la réalisation d'une bombe à uranium : par de multiples passages dans des membranes poreuses, un composé gazeux s'enrichit progressivement en isotope 235 fissile. Devenu citoyen américain en mars 1941, il s'engage complètement dans le projet Manhattan de construction d'une bombe atomique et fait partie du petit cercle qui, autour de Robert Oppenheimer, anime à partir de mars 1943 le laboratoire secret de Los Alamos au Nouveau-Mexique ; il participe aux recherches qui aboutiront à l'explosion de la première bombe A expérimentale américaine en juillet 1945. Comme plusieurs de ses collègues, Teller déconseille alors le lancement d'une bombe atomique sur le Japon, souhaitant qu'une explosion de démonstration dans le Nevada suffise à impressionner les armées ennemies pour les amener à conclure la paix.

À partir de 1942, l'équipe de physiciens, au sein de laquelle il prend progressivement plus de poids, travaille à la conception d'un engin exploitant la formidable puissance libérée par les processus de fusion nucléaire. Opposé à Oppenheimer, qui cherche à dissuader le président Harry Truman de réaliser ce projet, Teller met toute son énergie dans l'accomplissement du programme de[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

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