THOMPSON EDWARD (1924-1993)
Historien et activiste britannique, né le 3 février 1924, mort le 28 août 1993 à Upper Wick, dans le Worcester.
Né dans une famille de missionnaires méthodistes, Edward Palmer Thompson dirige une unité de blindés en Afrique et en Italie pendant la Seconde Guerre mondiale. En 1946, il termine ses études à Cambridge et adhère au Parti communiste. Dans les années 1950, il se consacre à l'organisation de la base du parti, milite en faveur de la paix, donne des cours du soir à l'université de Leeds et mène des recherches pour son premier ouvrage, une biographie de l'artiste socialiste William Morris.
Choqué par la manière dont les chars soviétiques écrasent l'insurrection hongroise de 1956, Thompson rompt avec le Parti communiste. Il n'en demeure pas moins un marxiste convaincu. Il participe ainsi à la création d'une nouvelle revue, New Left Review, autour de laquelle se forme le mouvement politique et intellectuel de la New Left en 1964. Les dissidents de cette nouvelle gauche influencent la pensée historique de Thompson, en particulier dans son célèbre ouvrage, The Making of the English Working Class (1963, La Formation de la classe ouvrière anglaise).
Dans une prose éloquente et passionnée, Thompson critique l'analyse marxiste classique qui considère les forces économiques impersonnelles comme des vecteurs clés du changement historique et la conscience de classe née au xixe siècle comme un produit direct du nouveau système de fabrication industrielle. Selon lui, l'essor de la classe ouvrière n'a rien eu d'automatique : les ouvriers du xixe siècle ont forgé leur propre identité collective au terme d'un processus long et difficile. Son ouvrage devient très vite l'un des plus importants de l'historiographie d'après guerre et amène les historiens à s'intéresser à la complexité de l'histoire « d'en bas » (from below). Il nourrit également le domaine relativement nouveau qu'est l'« histoire sociale anglaise » (Social history).
Malgré son influence grandissante, Thompson maintient une attitude ambivalente à l'égard des cercles académiques. Il critique les enseignants et, à l'université de Warwick où il enseigne à partir de 1965, se range aux côtés des manifestants étudiants qui demandent une réforme de l'université. Parallèlement, il produit aussi bien des essais historiques influents que des textes polémiques et satiriques, dont le plus célèbre est « The Moral Economy of the English Crowd in the Eighteenth Century » (1971). Cet article analyse le passage d'un modèle économique paternaliste, reposant sur la réciprocité entre les classes, à un modèle moderne fondé sur la logique sans limite des forces de marché. Il développe le concept hybride d'économie morale, né de la rencontre des normes culturelles, des pratiques sociales et des institutions économiques. Grâce à ce concept souple et complexe qui séduit les spécialistes de nombreux domaines, tels que l'anthropologie et l'histoire des sciences, l'article de Thompson fera date dans l'historiographie de l'après-guerre.
Au début des années 1980, le déploiements de nouveaux missiles en Europe par l'O.T.A.N. et le pacte de Varsovie amènent Thompson à abandonner temporairement ses recherches historiques pour se lancer dans la lutte contre le nucléaire. Engagé dans la lutte pour le désarmement nucléaire dès la fin des années 1950, il voyage désormais sans cesse, fait des discours et publie plusieurs ouvrages analysant la guerre froide et présentant sa vision d'une Europe débarrassée des superpuissances. Sa condamnation impartiale des deux blocs de la guerre froide lui apporte une large crédibilité en Europe de l'Ouest. Dans ce combat, Thompson est accompagné par son épouse Dorothy, historienne auteur d'ouvrages sur le chartisme, le rôle des femmes dans la[...]
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Écrit par
- Michael BESS : professeur agrégé d'histoire à l'université Vanderbilt de Nashville, Tennessee
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
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