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ZEEMAN EFFET

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Effet Zeeman des atomes et ions libres

Généralités

Pour un atome ou un ion libre (dans la suite de l'article, on utilisera le mot « atome » pour désigner l'une ou l'autre entité), la symétrie géométrique de H0 comporte, notamment, toutes les rotations autour d'axes passant par le noyau atomique O. Il en résulte qu'en champ magnétique nul chaque niveau propre Ei possède un moment cinétique total F de module bien défini √F(F + 1), avec F = 0, 1, ... ou avec F = 1/2, 3/2, ... et une dégénérescence d'ordre 2F + 1. On prendra ici h/2 π comme unité de moment cinétique. Les règles de sélection pour les transitions dipolaires électriques ou magnétiques (les plus intenses et les seules considérées ici) sont :

les transitions entre deux niveaux de F = 0 étant interdites.

Si B est non nul, on peut prendre sa direction comme axe des z, convention qui sera conservée dans toute la suite. La symétrie géométrique de H se réduit à Ch. Le moment cinétique total des niveaux propres de H n'est plus défini en toute rigueur, mais la composante Fz de F suivant l'axe Oz reste bien définie : Fz = M, avec M = 0, ± 1, ... ou avec M = ± 1/2, ± 3/2, ... Les règles de sélection s'écrivent ΔM = 0 ou ± 1 et s'accompagnent de règles de polarisation. Pour les transitions dipolaires électriques (les plus intenses) :

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– Une transition ΔM = 0 est dite transition π. Elle est polarisée linéairement, parallèlement à Oz, et n'apparaît donc pas en observation longitudinale, c'est-à-dire dans la direction de B.

– Une transition ΔM = + 1 en absorption (ou ΔM = − 1 en émission) est dite transition σ+. Elle est généralement polarisée elliptiquement et prend des polarisations simples pour deux directions particulières d'observation : pour l'observation transversale (si l'on regarde perpendiculairement à la direction de B), elle est polarisée linéairement, perpendiculairement à Oz ; en observation longitudinale, elle est polarisée circulairement dans le sens de la rotation du courant électrique qui crée le champ B. L'intensité des composantes σ+ est deux fois plus grande en observation longitudinale qu'en observation transversale.

– Une transition ΔM = − 1 en absorption (ou ΔM = + 1 en émission), est dite transition σ-. Elle présente les mêmes caractéristiques qu'une transition σ+, mis à part une inversion du sens de rotation des vibrations elliptiques ou circulaires.

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Dans le cas de transitions dipolaires magnétiques (beaucoup moins intenses que les précédentes), les règles de polarisation sont inchangées en observation longitudinale. En revanche, en observation transversale, ce sont les raies ΔM = 0 qui apparaissent polarisées perpendiculairement à Oz et les raies ΔM = ± 1 parallèlement à Oz.

Négligeant des termes en B2 dont l'effet est très peu important pour les intensités de champ magnétique pratiquement réalisables, le hamiltonien V(B) d'interaction entre atome et champ d'induction peut se mettre sous la forme − M . B, où M est l'opérateur moment magnétique atomique. En détaillant l'expression de M, on obtient :

où β, le magnéton de Bohr, est égal à eh/4πm, d'où β/h = 14,0 GHz ( T-1 et où Lz, Sz, et Iz sont respectivement les composantes suivant Oz des opérateurs L, moment cinétique électronique total, S, moment cinétique total de spin électronique, et I, moment cinétique nucléaire. Les coefficients gS et gI sont sans dimension. le coefficient gS égal est à 2,002 32, valeur déterminée théoriquement par l'électrodynamique quantique et parfaitement confirmée par l'expérience. Le coefficient gI, appelé facteur de Landé nucléaire, dépend du noyau de l'atome ; il peut être positif ou négatif, mais il reste toujours de l'ordre de 10-3 ou de 10-4, de sorte que, dans l'expression (2), le terme en gIIz est généralement très faible par rapport aux deux autres ; il est complètement absent pour les isotopes dépourvus de spin nucléaire. On considérera ci-dessous un tel isotope sans spin nucléaire. On désigne alors traditionnellement par J l'opérateur moment cinétique total :

Atome sans spin nucléaire. Effet Zeeman linéaire

Quand B est assez faible pour que les décompositions Zeeman de chaque niveau soient très petites devant l'écart entre les niveaux en champ nul, il suffit d'utiliser la théorie des perturbations à l'ordre le plus bas. Un niveau de champ nul d'énergie E0, de moment cinétique total √J(J + 1), se décompose en 2J + 1 sous-niveaux Zeeman équidistants, caractérisés chacun par une valeur différente de Jz = MJ, avec MJ = − J, − J + 1, ..., J. Les énergies de ces sous-niveaux sont :

où le facteur de LandégJ est un coefficient sans dimension, caractéristique du niveau atomique considéré. Pour une transition entre un niveau (E0, J) et un niveau (E′0, J′), la position de l'ensemble des composantes Zeeman de la raie émise ou absorbée se calcule en fonction de deux paramètres seulement, les facteurs de Landé gJ et gJ des deux niveaux en question (voir sur la figure c l'exemple des transitions entre un niveau de J = 1/2 et des niveaux J′ = 1/2 et J′ = 3/2). De plus, l'intensité relative des différentes composantes Zeeman d'une transition (E0, J) → (E′0, J′) peut être calculée une fois pour toutes, indépendamment de la nature de l'atome en question.

Intensités relatives d'une transition - crédits : Encyclopædia Universalis France

Intensités relatives d'une transition

Le tableau indique les intensités en observation longitudinale pour les composantes σ+ et σ- et les intensités en observation transversale pour les composantes π. En observation transversale, il convient de diviser par 2 les intensités indiquées pour les composantes σ. On peut vérifier, à partir du tableau, que, pour une transition (J → J′) donnée, la somme I+ des intensités des composantes σ+ est égale à la somme Iπ des intensités des composantes π et à la somme I- des intensités des composantes σ-. Il en résulte que l'émission totale, sommée sur l'ensemble des composantes Zeeman d'une raie, est isotrope. Dans la direction du champ magnétique, on a une intensité I+ + I- et, dans une direction transverse, on a une intensité égale à Iπ + (I+ + I-)/2. Sur la figure c sont indiquées les polarisations des composantes Zeeman et leurs intensités relatives, calculées d'après le tableau.

L'effet Zeeman est un outil très utile pour l'interprétation des spectres atomiques. En observant le nombre, la polarisation et l'intensité des composantes Zeeman d'une raie spectrale, on peut déduire, d'après ce qui précède, les nombres quantiques J et J′ des deux niveaux en jeu dans cette transition, ce qui facilite la classification des raies, puis celle des niveaux atomiques. En outre, en mesurant la position des composantes Zeeman dans un champ d'intensité B connue, on obtient les facteurs de Landé gJ et gJ que l'on peut comparer à des valeurs théoriques calculées à partir du hamiltonien « perturbateur » V(B) de l'équation (2) et des fonctions d'onde décrivant les états propres de l'atome en champ nul. Ce calcul est plus ou moins compliqué suivant les cas et suivant la précision requise. On se bornera à indiquer quelques résultats simples et importants. Pour de nombreux atomes, l'approximation du couplage L-S est bonne, c'est-à-dire que chaque niveau est caractérisé non seulement par E0 et J, mais par des nombres quantiques L de moment cinétique orbital et S de spin total. Le facteur de Landé est alors donné par la formule :

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Cette formule s'applique en particulier aux atomes à un électron optique (c'est-à-dire ayant un seul électron en dehors des couches saturées). Elle s'applique aussi à de nombreux atomes à plusieurs électrons optiques (notamment parmi les atomes légers). Pour certains atomes lourds, il est préférable d'utiliser l'approximation du couplage j-j (cf. atome). Avec deux électrons optiques en couplage j-j, chaque niveau est caractérisé non seulement par E0 et J, mais également par les nombres quantiques j1 et j2 de moment cinétique total du premier et du deuxième électron optique. Le facteur de Landé s'écrit alors :

Le facteur de Landé g1 (ou g2) du premier (ou du deuxième) électron optique supposé seul se calcule par la formule (3). Pour certains atomes lourds, le couplage n'est ni L-S pur ni j-j pur mais intermédiaire, et le calcul des facteurs de Landé est plus compliqué.

Signalons enfin le cas particulier des niveaux de singulet en couplage L-S pur. Il s'agit des niveaux pour lesquels S = 0. On a alors L = J, et la formule (3) donne gJ = 1. Pour une transition optique entre deux niveaux de singulet, les intervalles énergétiques entre sous-niveaux Zeeman sont les mêmes dans les deux niveaux (la figure 6 de l'article atome donne un exemple d'une telle transition avec J = 1 et J′ = 2). Il en résulte que toutes les composantes π ont la même fréquence :

et que toutes les composantes σ± ont les mêmes fréquences :
c'est ce que l'on appelle l'effet Zeeman normal, celui que permettait d'expliquer la théorie classique de Lorentz. L'effet normal est en fait beaucoup moins répandu que l'effet dit anormal, celui de toutes les raies autres que les transitions singulet-singulet, en couplage L-S pur.

Atome sans spin nucléaire. Effet Paschen-Back

Quand le champ magnétique devient trop intense pour que l'on puisse considérer βB comme très petit devant l'écart entre les niveaux en champ nul, la théorie des perturbations doit être poussée à un ordre supérieur. Il en résulte que :

– Les positions des composantes Zeeman ne dépendent pas linéairement de B ; on peut les représenter par des développements en série où l'on ne néglige plus les termes en B2, B3, etc.

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– Les intensités des composantes Zeeman ne restent pas égales aux valeurs constantes données dans le tableau. On peut les représenter par des développements en série où l'on ne néglige plus les termes en B, B2, etc.

Ces écarts aux lois simples de l'effet Zeeman linéaire portent le nom d'effet Paschen-Back. Très souvent, il suffit de traiter le problème de la perturbation magnétique à l'intérieur d'un multiplet de structure fine, c'est-à-dire, en couplage L-S pur, pour l'ensemble des niveaux provenant de l'effet du couplage spin-orbite sur un terme spectral de L et de S donnés. On est alors amené à diagonaliser le hamiltonien :

sur la base des (2S + 1)(2L + 1) fonctions correspondant à un S et à un L donnés. La quantité V(B) est la perturbation magnétique explicitée par l'équation (2), λL ( S le couplage spin-orbite, λ la constante de couplage spin-orbite du multiplet considéré. La figure a donne les résultats de ce calcul pour les niveaux 2P1/2 et 2P3/2 d'un atome alcalin sans spin nucléaire. En champ faible, les deux niveaux 2P1/2 et 2P3/2 (séparés par l'écart 3λ/2) sont décomposés respectivement en deux et quatre sous-niveaux avec pour facteurs de Landé g1/2 = (4 − gs)/3 et g3/2 = (2 + gs)/3 (cf. formule 3, supra). En champ intermédiaire, les quatre niveaux MJ = 1/2 ou MJ = − 1/2 ont des énergies qui ne varient plus linéairement en fonction de B, et le moment cinétique total J n'est plus un bon nombre quantique, tandis que sa projection MJ sur Oz conserve une valeur bien définie. En champ très fort, les divers sous-niveaux Zeeman correspondent à des valeurs bien définies des projections ML et MS de L et de S sur Oz (et, par suite, de MJ = ML + MS). L'énergie varie à nouveau linéairement en fonction de B (découplage Paschen-Back total).

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Soit maintenant une transition optique 2S1/2 → 2P1/2, 2P3/2 pour laquelle l'état fondamental 2S1/2, ayant un moment orbital L nul, ne donne pas lieu à l'effet Paschen-Back (l'énergie des sous-niveaux Zeeman de 2S1/2 varie linéairement avec B jusqu'à des champs très intenses). La figure b indique la variation d'intensité des différentes composantes Zeeman en fonction de B, et les figures schématisent les effets Zeeman observés pour trois valeurs de B.

Généralement, les phénomènes sont un peu plus compliqués que ceux décrits par les figures, car les deux niveaux en cause possèdent usuellement un moment orbital L non nul, de sorte qu'ils donnent lieu tous les deux à des phénomènes d'effet Paschen-Back comparables à ceux de la figure a. Néanmoins, les propriétés suivantes sont générales. Les règles de sélection en champ très fort sont ΔMS = 0, ΔML = 0 (transition π) ou ΔML = ± 1 (transition σ±).

Les positions des raies composantes en champ très fort varient linéairement avec B. Elles se regroupent en trois paquets qui formeraient un triplet Zeeman normal si l'on « oubliait » que chacun est formé de plusieurs composantes. En champ intermédiaire, les positions des raies composantes varient de façon non linéaire avec B, leurs intensités dépendent de B et la seule règle de sélection qui subsiste est ΔMJ = 0 (transition π), ΔMJ = ± 1 (transition σ±).

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On n'envisagera pas l'effet Paschen-Back dans le cas d'un couplage j-j ou intermédiaire.

Influence du spin nucléaire

Soit maintenant un isotope de spin nucléaire non nul (cf. chap. 2, Généralités). On est amené à distinguer quatre domaines de champ magnétique.

En champ très faible, les moments cinétiques électroniques J et nucléaire I sont couplés pour donner une résultante F. L'effet Zeeman est linéaire, chaque sous-niveau hyperfin F se décomposant en 2F + 1 sous-niveaux |F, MF>, équidistants, d'écart gFβB, avec :

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expression dans laquelle gJ désigne le facteur de Landé qu'aurait le niveau considéré en absence de spin nucléaire. Le deuxième terme de la formule (4) est beaucoup plus petit que le premier et peut, en général, être négligé. Les règles de sélection et de polarisation sont celles que donnent l'équation (1) et les paragraphes suivants. Les intensités relatives des composantes Zeeman d'une raie hyperfine donnée s'obtiennent par les formules du tableau en y remplaçant J par F, J′ par F′ et MJ par MF.

En champ magnétique moyen, les moments cinétiques I et J se découplent, ce qui cause une variation des probabilités de transition et une non-linéarité de la position des composantes en fonction de B (effet Back-Goudsmit). Ce que l'on a dit à propos de l'effet Paschen-Back se transpose ici en remplaçant L par J, S par I, J par F, ML par MJ, MS par MI, MJ par MF, gL = 1 par gJ, gS par gI, gJ par gF et le couplage spin-orbite par le couplage hyperfin. Comme le couplage hyperfin est généralement bien plus faible que l'interaction spin-orbite, l'effet Back-Goudsmit s'observe dans des champs B plus faibles que l'effet Paschen-Back.

En champ magnétique plus élevé, le découplage I-J est total ; les niveaux sont caractérisés par les nombres quantiques I, J, MI et MJ ; leurs énergies varient à nouveau linéairement avec B et les règles de sélection sont d'une part ΔMI = 0, d'autre part ΔMJ = 0 pour les composantes π et ± 1 pour les composantes σ±. On observe alors un spectre Zeeman analogue à celui que donnerait le même atome dépourvu de spin nucléaire, mis à part que chacune des composantes Zeeman, au lieu d'être simple, est formée de 2I + 1 « sous-composantes » équidistantes, d'intensités égales et correspondant chacune à une valeur possible de MI. Cette particularité a permis la détermination expérimentale du spin nucléaire I d'un certain nombre d'isotopes.

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En champ magnétique fort, L et S se découplent. C'est l'effet Paschen-Back que l'on a déjà décrit.

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Effet Zeeman : exemple hypothétique - crédits : Encyclopædia Universalis France

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