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ÉGLISE, architecture

Le style gothique

La réforme grégorienne n'a pas imposé de style architectural spécifique. La production artistique des xie et xiie siècles a pris au xixe siècle le nom de « romane ». Elle apparaît aujourd'hui comme un ensemble extrêmement varié, et par là même, d'une richesse étonnante, mais obéit à des choix très différents. Ainsi, dans l'empire, l'attachement à la tradition carolingienne s'imposa, comme en témoignent les édifices de la période ottonienne. Ailleurs, en France notamment, le panorama demeura plus proche des formes constantiniennes. Dans l'un et l'autre cas, les vaisseaux sont simples, éclairés et charpentés. Ce n'est qu'à la fin du xie siècle que se fait jour un sentiment nouveau. Il se manifeste à l'extérieur par une composition des masses fondées sur leur équilibre pour créer l'harmonie. À l'intérieur, les recherches plastiques deviennent déterminantes ; le couvrement de pierre s'impose. Il va aboutir à réduire les espaces (8 mètres environ pour le vaisseau central), à diminuer les percements pour ne pas déséquilibrer la structure, alors qu'en même temps les tribunes se généralisent, des murs plus épais se creusent, les supports se diversifiant. Il s'établit ainsi comme à l'extérieur une nouvelle harmonie, due au juste équilibre de tous les éléments. De façon générale, les architectes ont fait preuve d'une grande liberté créatrice, que l'architecture religieuse n'avait pas connue jusqu'alors.

Le style gothique s'inscrit dans l'optique de la réforme grégorienne. Il lui donne une forme qui s'imposera peu à peu dans une grande partie de l'Europe de l'Ouest. Cette forme est l'expression visuelle d'une pensée enfin aboutie. Apparue à un moment précis, dans un territoire circonscrit, voulue par des maîtres d'ouvrage, abbés ou évêques, déterminés dans leur action, elle apparaît à la fois comme une synthèse des différents courants architecturaux et comme une réponse à un programme. Les maîtres d'ouvrage, qui appartenaient à une même génération, ont œuvré entre 1130 et 1150 dans un rayon de 150 kilomètres autour de Paris. Tous étaient marqués par la pensée nouvelle développée dans l'abbaye parisienne de Saint-Victor autour de Hugues. Suger, l'abbé de Saint-Denis (1126-1151) s'est exprimé dans ses différents écrits sur la reconstruction de son abbaye et sur le sens qu'il lui donnait. L'art gothique ne se juge pas à partir de ses composantes, mais comme un tout, fusionné dans une volonté globalisante de création. Il se rapproche sur ce point des constructions du ive siècle, moment où il s'agissait de créer une architecture chrétienne. Le maître d'ouvrage retrouvait, comme évêque ou comme abbé, la plénitude de son pouvoir et définissait le programme en accord avec le maître d'œuvre. Ce dernier dirigeait la totalité du chantier et les différents corps de métier responsables du travail de la pierre, du bois, du verre, de la sculpture et des ornamenta ecclesiae. L'un comme l'autre ne pouvaient admettre la moindre dissonance dans un concert admirablement réglé. Ce qui subsiste de Saint-Denis au xiie siècle, comme de Chartres admirablement conservée, le confirme aisément.

Le programme minutieusement élaboré devait apporter une solution globale aux problèmes soulevés par la réforme grégorienne. Pour ce qui est de l'ouest, la nécessité de ménager au fidèle un accès aisément identifiable, de lui donner une signification emblématique et d'affirmer un message visuel fort aboutirent à répandre le thème de la façade harmonique complétée par un vaste programme sculpté, dans les abbatiales (Saint-Denis), mais surtout dans les cathédrales. Il s’agissait d’associer en un seul élément façade, tours et clochers ainsi que[...]

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