ÉGLISE ET SECTE, notion d'
Les perspectives actuelles
La distinction entre secte et Église possède une valeur typologique plutôt que directement descriptive, en particulier dans le paysage religieux actuel où les grandes Églises chrétiennes se trouvent écartelées entre deux logiques opposées : continuer à être des institutions pour le plus grand nombre en répondant aux demandes de sacralisation des grands moments du cycle de vie (baptême, mariage, obsèques) par les rites (logique ecclésiale), ou bien se concentrer sur le petit noyau de fidèles militants aspirant à une vie religieuse plus intense (logique sectaire). En outre, dans la situation de pluralisme religieux accentué qui caractérise l'époque récente, les Églises se transforment progressivement en « agences » qui renoncent à toute prétention au monopole de la vérité religieuse et des moyens de salut, c'est-à-dire qu' elles correspondent désormais au type sociologique de la « dénomination » plus qu'à celui de l'Église pure.
Inversement, l'apparition de courants religieux nés hors du champ chrétien (mouvements orientaux et extrême-orientaux), ou encore de groupes syncrétiques qui allient spiritualité, développement personnel et psychologie des profondeurs, fait sortir également la secte du schéma classique : il ne s'agit plus tellement, dans ce cas de figure, de rechercher le salut au sein de petites communautés égalitaires (selon le modèle protestant de la congrégation), mais de découvrir une sagesse ici-bas et dans l'ici et maintenant grâce à la mise en œuvre de méthodes rituelles ou bien « psychospirituelles ». Dès lors, la relation au maître ou au dispensateur de la méthode de transformation de soi devient plus importante que la communauté fraternelle caractéristique de la secte classique. Ces mouvements, parfois qualifiés de « cultiques » par opposition aux Églises, aux sectes et aux dénominations, allient fréquemment un pouvoir de type charismatique et une organisation bureaucratique hiérarchisée. Ils correspondent, plus que les non-conformismes de terrain chrétien évoqués plus haut, à ce que le grand public qualifie – dans un sens généralement controversé – de « secte ». Cela amène à penser que l'opposition entre l'Église et la secte ne prend véritablement tout son sens qu'à l'intérieur des mouvements se réclamant du christianisme.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Louis HOURMANT : enseignant à l'université de Paris XII-Créteil-Val-de-Marne, membre du Groupe de sociologie des religions et de la laïcité