ÉGYPTE ANTIQUE (Civilisation) L'art
Les arts appliqués
Restitué par les scènes figurant dans les chapelles des tombes, le cadre de la vie quotidienne est aussi connu grâce à l'abondant matériel entreposé près du défunt, dispersé le plus souvent par les pilleurs, mais parfois retrouvé in situ. Ayant une fonction rituelle, les objets sont pour la plupart faits de matériaux précieux et ouvragés avec soin. S'ils donnent de la culture matérielle une image plus luxueuse qu'elle ne l'était en réalité, ils n'en sont pas moins d'inestimables témoins des occupations et des mœurs des anciens Égyptiens.
Accumulés pendant la XIe dynastie et le début de la XIIe dans les sépultures rupestres pour compenser l'absence de décor pariétal, les modèles, maquettes en bois aux couleurs bariolées d'une taille dépassant rarement 20 centimètres, croquent le petit peuple, voire à l'occasion le maître de la tombe, dans des instantanés saisis sur le vif. Ces scènes de labour, d'élevage, d'inspection du bétail, de boulangerie, de brasserie, de tissage, de pêche, de navigation, traitées dans un style naïf, constituent une production modeste, mais non dénuée de charme. L'art de la menuiserie a fourni des pièces d'un raffinement délicat, telles celles appartenant au mobilier funéraire de la mère de Chéops, minutieusement restaurées : un immense baldaquin plaqué d'or soutenu par de fines colonnettes, deux vastes fauteuils et un lit évoquent, entre autres, le confort de la chambre à coucher de la reine. Du trésor de Toutankhamon proviennent des lits – certains zoomorphes –, des coffres et des sièges en tout genre, souvent plaqués d'or et d'argent, incrustés de pierres semi-précieuses, de pâte de verre multicolore et chatoyante, ornés de dessins géométriques, d'emblèmes divins ou de motifs historiés : roi surpris dans son intimité en compagnie de sa jeune épouse ou seul sur son char, chassant et guerroyant. En bois et/ou en ivoire, les élégantes cuillères à fard de la XVIIIe dynastie – celles dites à la nageuse par exemple –, les vases à onguent ou à parfum, en terre cuite ou en pierre, montrant un enfant blotti contre le giron de sa mère ou une gracieuse servante nubienne tenant un lourd récipient appuyé sur la tête d'un babouin, jouent sur la sensualité des corps féminins, exploitent à l'infini la faveur dont jouissent à cette époque les thèmes naturalistes et exotiques.
Signes de richesse, prisés tout autant par les hommes que par les femmes, les bijoux, empreints d'une forte charge symbolique, garantissaient, par-delà la mort, grâce à leurs formes, à leur iconographie, aux matériaux qui les constituaient, l'accès à la renaissance éternelle. Réalisés en or, chair du soleil, pour les personnages les plus puissants, ils étaient sertis de quartz coloré ou de pierres fines, telles la cornaline rouge vif – comme le sang, promesse de vie –, le lapis-lazuli, dont le bleu sombre évoque la profondeur de la nuit, la turquoise, plus pâle, annonçant la clarté de l'aube, ou le feldspath vert, lié au renouvellement de la végétation. Trois découvertes ont pu donner l'exacte dimension du faste des parures couvrant les momies comme du talent des joailliers. Avant la mise au jour, à partir de 1922, de la collection de la tombe de Toutankhamon, il y eut, entre 1894 et 1914, la trouvaille de sept trousseaux du Moyen Empire – six appartenant à des reines et à des princesses, le dernier à une femme de haut rang. Puis, en 1939, l'ouverture de la sépulture inviolée de Psousennès à Tanis, qui, outre le corps du roi, abritait les dépouilles de trois autres personnages, a révélé la magnificence dans laquelle continuait à vivre la cour au début du Ier millénaire, période jusqu'alors jugée avec un certain mépris. Un inventaire complet des bijoux conservés[...]
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Écrit par
- Annie FORGEAU : maître de conférences à l'université de Paris-IV-Sorbonne, docteur d'État
Classification
Médias