ÉGYPTE ANTIQUE (Histoire) L'Égypte ptolémaïque
Le royaume ptolémaïque
L'Égypte ptolémaïque, apanage et propriété d'une famille, est parmi les royaumes d'Orient le plus original et peut-être le plus riche. Le caractère essentiel de son organisation est la centralisation. Tout part du roi, et tout revient à lui. Il est la loi vivante : lois (nomoi), règlements (diagrammata), ordonnances (prostagmata) sont des décisions royales, qui prennent souvent la forme de lettres. La lecture du corpus des ordonnances des Ptolémées permet de mesurer la variété et le nombre des sujets qui étaient soumis à la volonté du souverain : protestations de prêtres contre les excès commis par les fonctionnaires ou les militaires, faveurs sollicitées par des associations corporatives ou régionales, demande du droit d'asile pour tel ou tel sanctuaire, organisation de recensement d'esclaves, perception de taxes, circulaire réglant le versement des impôts, garanties accordées à certaines catégories de citoyens, ordonnances d'amnistie, tous les sujets sont abordés dans ces documents qui nous permettent de comprendre en sa variété le fonctionnement de l'administration royale et les problèmes posés à la royauté. De plus, comme tout différend devait être tranché par règlement royal, le tableau des requêtes (enteuxeis) adressées au souverain ptolémaïque évoque les détails de la vie publique et de la vie privée. À cet égard le recueil des Enteuxeis, publié par O. Guéraud, dépeint la vie quotidienne des sujets du roi ptolémaïque, et la Chrestomathie de U. Wilcken contient de précieuses indications sur les mœurs des gens de cette époque : vol d'un manteau, détournement d'objets et restitution de gages, prêt d'argent, salaire d'un barbier, jouissance des fruits d'une palmeraie, violences contre un porteur d'eau, incursion avec violence dans un Isieion, plainte d'une femme pour coups et blessures, prêt d'une ânesse, livraison incomplète d'une commande de vin, intimidation de témoins, etc. La seule énumération des sujets de ces requêtes fait comprendre qu'elles sont peut-être la meilleure voie d'accès aux réalités de l'époque ptolémaïque.
Une organisation hiérarchisée
Le roi s'entoure d'une cour (aulè) formée d'un ensemble de dignitaires dont les titres mêmes indiquent le caractère paternaliste de la monarchie ptolémaïque. Du haut en bas de cette hiérarchie compliquée, on trouve les « parents du roi », les « assimilés aux parents du roi », les « premiers amis », les « assimilés aux premiers amis », les « capitaines des gardes de corps », les « amis », les « gardes de corps », les « successeurs ». Le titre de « sœur » donné à la reine dissimule parfois non pas ce degré de parenté, mais un titre applicable, par exemple, à une cousine. Bref, la maison du roi est organisée comme une grande famille, où l'affection ou la fidélité cèdent trop souvent le pas aux coteries, voire aux haines et aux rivalités inexpiables, le crime étant le plus sûr moyen de succession.
Ne pouvant être omniprésent, le roi est assisté par des administrateurs aux compétences diversifiées et hiérarchisées. Une administration centrale et des administrations régionales secondent le souverain. La première fait d' Alexandrie le centre nerveux du royaume ; les secondes exercent leurs activités dans les nomes, c'est-à-dire les départements ou, si l'on préfère, les régions. Il y a, pour répondre aux innombrables requêtes, un chef de la chancellerie royale, l'épistolographe ; à la tête de la justice se trouve l'archidicaste. Le grand argentier, ou dioecète, résidait également à Alexandrie. Dans les provinces, le principe général de l'administration est de confier le règlement des affaires à un délégué représentant directement le souverain. Le stratège de nome, dont la charge était militaire à l'origine, concentre[...]
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Écrit par
- André BERNAND : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Dijon
Classification
Média