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ÉGYPTE ANTIQUE (Histoire) L'Égypte romaine et byzantine

Les méthodes de l'occupation romaine

Une organisation traditionnelle

La plus grande habileté de Rome fut sans doute de ne pas bouleverser l'administration qu'elle hérita de ses prédécesseurs en aménageant un système qui avait fait ses preuves. Une organisation hiérarchisée de façon minutieuse conservait à l'empereur toute la réalité du pouvoir et toute initiative.

Tacite déclare (Histoires, I, ii) : « Ce sont des chevaliers romains qui, depuis le divin Auguste, à la place des rois, gouvernent l'Égypte et les troupes destinées à la contraindre. On crut bon de tenir attachée à la maison impériale cette province d'accès difficile, riche en céréales, divisée et changeante dans ses superstitions et ses dérèglements, étrangère aux lois, ignorante des magistratures. » Une union personnelle est ainsi établie entre l'empereur, administrateur par l'intermédiaire de son délégué direct, le préfet d'Égypte, et le pays dont les habitants sont tenus à l'écart des magistratures à cause de leur inaptitude à les exercer.

Traditionnelle en son principe, l'administration de l'empereur l'est aussi en ses modalités : cet empereur romain, qui figure en habit de pharaon sur les murs des temples d'Égypte, dispose d'un réseau de fonctionnaires directement calqué sur l'organisation ptolémaïque, elle-même issue de l'administration pharaonique. On retrouve donc les stratèges ou gouverneurs des nomes, assistés du scribe royal ou basilicogrammate, de nomarques, de toparques et topogrammates, de comarques et comogrammates, les uns directeurs, les autres scribes des subdivisions du nome. Sans doute les Romains apportent-ils quelques innovations de détail : les comarques ou chefs des villageois sont remplacés par une commission d'anciens, les presbyteroi ; la vieille police des « phylacites » est réorganisée ; les « villes grecques » (Alexandrie, Ptolémaïs, Naucratis, Antinooupolis) conservent le privilège d'avoir une assemblée, mais, de façon générale, les notables, soumis à la surveillance étroite des fonctionnaires impériaux, ne jouissent d'aucune initiative et les métropoles des nomes ne connaissent guère de vie politique qui leur soit propre.

Centralisation et contrôle

La centralisation caractérise l'Égypte romaine comme elle définissait l'Égypte ptolémaïque. À ceci près que les Romains eurent soin qu'une même fonction fût exercée par deux ou plusieurs magistrats se surveillant les uns les autres. Le préfet d'Égypte, par exemple, est le grand gestionnaire des revenus dont il est fait emploi en Égypte, et il examine les comptes que ses subordonnés de tous les nomes lui font parvenir. Mais le chef suprême des finances, le diocète, contrôle aussi tous ces mouvements d'argent. En outre, l'idiologue est une sorte de procurateur fiscal, juge du contentieux, qui doit connaître de nombre d'affaires financières. De même en ce qui concerne la justice : le conventus juridicus se tient à date fixe dans les différentes régions, et c'est le préfet d'Égypte qui tranche les questions graves ; un papyrus le montre en train de rendre une sentence capitale. Mais le juridicus pouvait suppléer le préfet et contrôler sa juridiction. De même, les fonctions de stratèges et d'épistratèges pouvaient interférer, comme se confondaient parfois les commandements militaires.

Grandeur et servitudes de l'étatisme, tel pourrait être le sous-titre de cette période romaine de la vie de l'Égypte. Mais ce qui contribuait à la grandeur de Rome renforçait la servitude de l'Égypte. Il n'est donc point étonnant que celle-ci un jour ait voulu changer de maître.

— André BERNAND

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Dijon

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Média

Masque-plastron funéraire de femme - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Masque-plastron funéraire de femme