ÉLASTICITÉ
Cas des corps réels
Dans la théorie de l'élasticité, on admet, comme on l'a vu plus haut, que les actions réciproques des divers éléments de matière sont des actions de proche en proche. Dans un corps réel, quelle que soit la conception physique des actions mécaniques internes considérée, un élément de matière a certainement une action sur des éléments situés à une distance petite mais finie ; on peut, cependant, admettre qu'au-delà d'une distance d1 qui est très petite, l'action mutuelle de deux particules est négligeable.
Longueur d'homogénéité
La matière réelle n'est en fait ni homogène, ni isotrope ; un morceau d'acier, par exemple, est constitué par un agrégat complexe de cristaux d'espèces différentes enchevêtrés entre eux. Les seules propriétés qui soient les mêmes en tous les points et dans toutes les directions sont celles qui sont relatives à une quantité finie de matière composée d'un très grand nombre de cristaux considérés globalement. On ne peut donc imaginer la matière réelle comme homogène et isotrope que si on ne l'examine pas à une trop petite échelle.
Considérons des petits cubes de matière de côtés l ; il existe une longueur l1 au-dessous de laquelle ces petits cubes ne peuvent être considérés comme ayant les mêmes propriétés et cela à cause de l'hétérogénéité microscopique de la matière. La longueur l1 est la longueur d'homogénéité. Pour l'acier, l1 peut être de l'ordre du dixième de millimètre ; pour certains alliages, elle peut être beaucoup plus grande.
On peut considérer qu'on a toujours l1 > d1. Il résulte de ces considérations qu'une théorie supposant les corps homogènes et isotropes ne sera entièrement applicable aux corps réels que si les longueurs qui interviennent dans cette théorie sont supérieures à l1 et à d1. Tel n'est pas le cas de la théorie de l'élasticité qui fait intervenir des longueurs infiniment petites. Examinons les difficultés qui peuvent en résulter pour la définition de la contrainte.
Contraintes
Soit un élément dΩ de la surface (Σ) d'un corps donné et soit s la somme des forces internes appliquées à dΩ. Portons en abscisse dΩ et en ordonnée s/dΩ et faisons tendre dΩ vers zéro. Le rapport s/dΩ est bien défini et varie de manière continue tant que dΩ > dΩ1, d Ω1 étant une surface dont les dimensions sont du même ordre de grandeur que la longueur d'homogénéité. Lorsque dΩ < dΩ1, s/dΩ a des valeurs incohérentes. Deux cas peuvent alors se produire :
1. Le rapport s/dΩ atteint pratiquement une valeur limite et s une direction limite avant que dΩ ait atteint la valeur dΩ1 ; on appelle alors contrainte le vecteur ayant pour grandeur et direction ces valeurs limites. Bien que ce soit physiquement incorrect, on peut dire, d'une manière abrégée, que la contrainte est la limite du rapport s/dΩ lorsque dΩ tend vers zéro.
2. Le rapport s/dΩ n'a pas encore atteint de valeur limite lorsque dΩ = dΩ1 ; on ne peut alors définir la contrainte, et la théorie classique tombe en défaut. Ce cas se produit :
– lorsque les cristaux ne sont pas très petits par rapport aux dimensions de la pièce ;
– dans les régions où les efforts internes varient rapidement d'un point à un autre, ce qui se produit aux environs des régions de la surface extérieure ayant une très forte courbure ainsi qu'au voisinage des points de la surface extérieure où sont appliqués des efforts concentrés, par exemple dans les régions où deux pièces, dont l'une a une forte courbure, entrent en contact ponctuel. Certaines anomalies dans les lois de la rupture des pièces peuvent d'ailleurs résulter de cette impossibilité de définir la contrainte.
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Écrit par
- Michel CAZIN : professeur au Conservatoire national des arts et métiers
- Michel KOTCHARIAN : ingénieur du génie maritime
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