ÉLECTIONS Histoire des élections
Diversité des pratiques électorales
La fabrication d'un rituel
L'organisation régulière d'élections, quelles qu'en soient les modalités, contribue à la fabrication d'un rituel électoral, variations autour de la forme particulière que prend l'élection dans un pays ou une région donnée. Il y a en effet des différences dans les pratiques électorales qui ne doivent rien aux modes de scrutin ou aux règles de droit contrairement aux croyances des juristes, mais qui relèvent de l'apprentissage d'un rituel. Cela explique pourquoi l'élection, identique dans son principe, revêt en pratique des formes si différentes, en fonction de conjonctures politiques précises mais aussi des rapports de force entre les groupes mobilisés autour des enjeux électoraux. Même si on constate aujourd'hui une tendance à l'uniformisation des modèles électoraux, les façons de voter et de se faire élire varient sensiblement d'un État à un autre. La fabrication d'un rituel électoral s'inscrit toujours dans une histoire collective singulière par laquelle l'ordre politique s'inscrit dans un ordre social. En ce sens, on peut, comme l'a fait Pierre Bourdieu, appréhender l'élection comme la participation limitée de profanes (les électeurs) aux luttes réglées au sein du champ politique par laquelle se perpétue l'idée de la représentation.
Le recours régulier aux procédures électives est l'argument principal par lequel les élites indiennes désignent leur pays comme « la plus grande démocratie du monde ». Argument imparable si l'on s'en tient à la taille du corps électoral, soit environ 600 millions d'électeurs. Mais, comme l'a souligné Christophe Jaffrelot, ce qui caractérise en premier la démocratie indienne, c'est la manière dont les institutions parlementaires récentes se combinent avec l'ancienne tradition des castes. Dans ce vaste État fédéral, le système électoral ne s'est pas affranchi des structures du passé. La « démocratie par la caste » a permis, dans les années qui ont suivi l'indépendance accordée en 1947, le maintien au pouvoir des élites, mais la mobilisation des castes inférieures a produit par la suite une forme originale de compétition politique où l'élection prend forme et s'inscrit dans les clivages sociaux de la société indienne.
Très souvent, les compétitions électorales sont marquées par l'omniprésence des pratiques clientélaires. Au Bénin, lors des premières élections pluralistes qui ont suivi la fin de la dictature, en 1991, les électeurs se voient proposer une bière, un tee-shirt ou un billet de 500 francs CFA pour garnir les salles de meeting ou voter pour tel ou tel candidat. Mais, en l'occurrence, ce qui compte est moins l'achat, ou plutôt les tentatives d'achat des votes, que l'attitude des électeurs : rien n'empêche les plus malins ou les plus audacieux d'entre eux d'accepter les cadeaux successifs de tous les protagonistes et de voter comme bon leur semble le jour du scrutin... Cet exemple montre que, pour être efficaces, les libéralités électorales doivent s'inscrire dans des liens clientélaires anciens où l'obligation du contre-don est susceptible d'être socialement sanctionnée par le groupe d'appartenance. Il n'en demeure pas moins que, dans des sociétés où les inégalités sociales sont très importantes, le don peut devenir un élément du rituel électoral.
Argent, fraudes et élections
Le financement est une des composantes importantes des campagnes électorales modernes. Pour se faire élire, il est nécessaire de disposer de sommes qui, la plupart du temps, excèdent de beaucoup les possibilités financières des candidats et de leurs partis. Aux États-Unis, l'argent est devenu le critère principal de sélection du personnel[...]
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Écrit par
- Christophe VOILLIOT : maître de conférences en science politique à l'université de Paris Nanterre
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