ÉLIE
Prophète d'Israël (en hébreu : elî-Yahû, « Yahvé est mon Dieu ») qui est l'un des personnages les plus populaires, aussi bien dans la Bible — Ancien Testament et Nouveau Testament — que dans les traditions juives tardives. Sa biographie, avec laquelle s'articule celle d'Élisée, son successeur, a pris la forme d'une ample légende. Un cycle de récits sur son personnage et ses miracles (uniques dans tout l'Ancien Testament, ils auront un parallèle néo-testamentaire dans la série des miracles de Jésus) a été inséré dans le Ier Livre des Rois (xvii, 1-24 ; xxi, 17-28) et dans le Deuxième (i, 2-ii, 12).
Élie était originaire de Galaad, terre transjordanienne, où le yahvisme, héritage des ancêtres, s'était conservé dans sa plus grande pureté, à la différence de ce qui se passa dans les territoires occidentaux de Canaan, où les mélanges religieux étaient une menace redoutable pour le culte du « Dieu jaloux ». La Bible montre Élie luttant vigoureusement, sur le terrain du royaume du Nord, pour rétablir l'appartenance d'Israël à Yahvé seul, l'opposition étant irréductible entre celui-ci et Baal (ce dont témoigne la fameuse séquence du sacrifice au mont Carmel, I Rois, xviii, 20-40). L'expérience mystique de l'Horeb (xix, 1-8) évoque celle de Moïse au Sinaï (appelé aussi Horeb dans l'Exode).
Jointes aux légendes d'Élisée, les traditions concernant Élie ont été fixées à une époque postérieure aux deux personnages, sans doute par les disciples d'Élisée. Élie et Élisée apparaissent exécutant les mêmes gestes : avec le même manteau, ils frappent les eaux du Jourdain (II Rois, ii, 8-14), qui se partagent. Dans un tel contexte, le Jourdain est le rappel de l'entrée en Palestine (Josué, iii, 16) et l'événement symétrique du passage de la mer Rouge (Exode, xiv). C'est aussi très probablement le lieu d'un pèlerinage où le peuple commémorait liturgiquement et célébrait en même temps la sortie d'Égypte et l'entrée en Canaan. Ainsi les deux prophètes sont-ils présentés comme enracinés dans la tradition religieuse la plus fondamentale d'Israël. Le manteau d'Élie a été repris par Élisée (II Rois, ii, 13). Ce rite, consécutif au partage des eaux du Jourdain, est un geste rituel et symbolique qui assurait, en la signifiant, la succession prophétique.
Le Nouveau Testament évoque quatre faits de la vie d'Élie : la sécheresse de I Rois, xvii, 1 (Luc, iv, 25 ; Jacques, v, 17 ; Apoc., xi, 6) ; le miracle chez la veuve de Sarepta mentionné dans I Rois, xvii, 9 (Luc, iv, 25) ; la fuite d'Élie dans I Rois, xix, 1-18 (Romains, xi, 2-5) ; le jugement de Dieu (II Rois, i, 10-12) auquel Élie a soumis ses adversaires (Luc, ix, 54).
Le récit de l'enlèvement mystérieux d'Élie aux cieux (II Rois, ii, 11) est à l'origine de l'attente de son retour (Malachie, iii), attente manifestée par des traditions et croyances diverses, dont le texte d'Ecclésiastique, xlviii, 1-14 est un bon témoin. La présentation évangélique de la figure de Jean-Baptiste comme celle du précurseur, et nommément comme celle d'Élie (Matth., xvii, 11), s'insère directement dans un tel contexte.
Le retour d'Élie précédant l'apparition du Messie était une donnée universelle dans le judaïsme. L'intervention du prophète lors de l'événement messianique lui donnerait d'avoir part à la résurrection des morts. On sait aussi que saint Justin fréquentait des juifs qui enseignaient qu'Élie en personne oindrait le Messie (ce thème devint courant au Moyen Âge) et le révélerait à tous. À l'époque tannaïtique, et davantage encore après, circulaient des récits d'apparitions d'Élie aux rabbins et de conversations qu'il aurait tenues avec eux.
Dans le judaïsme[...]
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Écrit par
- André PAUL : bibliste
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Autres références
-
CARMEL
- Écrit par Marie-Madeleine DAVY
- 1 539 mots
Né au xiie siècle, le Carmel, ordre mendiant voué à la solitude, à la prière et à l'apostolat, aime à se rattacher au prophète Élie. Illustré par de nombreux mystiques, Thérèse d'Avila, Jean de la Croix et Thérèse de Lisieux, il fut toujours considéré, en dépit des métamorphoses...