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ELLE (P. Verhoeven)

Palme d’or annoncée et souhaitée par de nombreux journalistes, Elle a été ignoré par le jury du festival de Cannes 2016. Avec ce seizième film, Paul Verhoeven poursuit pourtant une œuvre d’une rare cohérence. Elle décrit notre monde à l’image du Moyen Âge crépusculaire de La Chair et le Sang (1985). Un monde où la dégénérescence des valeurs d’une civilisation donnait libre cours à la violence primitive et aux pires abjections. À ceci près qu’aujourd’hui la barbarie revêt des apparences froides et douces, et que la violence physique – un viol en l’occurrence – reste du domaine de l’intime et du silence, à moins qu’elle ne s’expose et ne se monnaie sur le mode virtuel, celui des jeux vidéo par exemple.

Un portrait de femme

Librementadapté d’un roman de Philippe Djian, « Oh... » (prix Interallié 2012), Elle pourrait se résumer ainsi : une femme est attirée physiquement par un homme qui se révélera être son violeur. Malgré les succès rencontrés par Verhoeven au cours de sa période américaine (RoboCop, Total Recall, Basic Instinct...), le projet rebuta les décideurs hollywoodiens, qui redoutaient la censure, le scandale et les polémiques (qui ne manquèrent pas de survenir à la sortie du film). Verhoeven se heurta également à un refus des stars contactées d’endosser le rôle d’une victime quinquagénaire qui, au lieu de susciter la compassion, se révèle égoïste, manipulatrice sans scrupules, ne respectant ni mère, ni père, ni progéniture, et encore moins sa meilleure amie. C’est l’intérêt qu’Isabelle Huppert porta au roman, soutenue par le producteur Saïd Ben Saïd, qui permit à Elle de voir le jour en France.

<em>Elle</em>, P. Verhoeven - crédits : SBS Productions, Twenty Twenty Vision Filproduktion, France 2 cinema, Entre Chien et Loup/ BBQ_DFY/ Aurimages

Elle, P. Verhoeven

Isabelle Huppert interprète donc le rôle de Michèle Leblanc, une femme moderne et dynamique, sûre d’elle, très directive dans sa vie comme dans son métier. Elle a fondé, avec Anna (Anne Consigny), une société de conception de jeux vidéo florissante. L’équipe de concepteurs est totalement masculine, mais Michèle sait parfaitement rappeler qui tient les rênes. Sur le plan familial, elle entretient largement sa septuagénaire de mère, Irène (Judith Magre), beaucoup son fils Vincent (Jonas Bloquet), avide de paternité même imaginaire, et encore un peu Richard (Charles Berling), son ex-mari, écrivain raté. Côté cœur, ou plutôt sexe, elle a pour amant Robert (Christian Berkel), le mari de son associée et « meilleure amie », Anna.

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

Classification

Média

<em>Elle</em>, P. Verhoeven - crédits : SBS Productions, Twenty Twenty Vision Filproduktion, France 2 cinema, Entre Chien et Loup/ BBQ_DFY/ Aurimages

Elle, P. Verhoeven