ELSSLER FRANZISKA dite FANNY (1810-1884)
Danseuse autrichienne, née à Gumpendorf, près de Vienne. Fille du copiste et confident de Joseph Haydn, Fanny Elssler ne sera pas une danseuse enfermée dans les milieux du spectacle (elle sera la maîtresse du duc de Reichstadt ; voir L'Aiglon d'Edmond Rostand !).
Elle étudie la danse avec Aumer, avant de débuter à Vienne au théâtre de la Porte de Corinthe. Elle se produit ensuite en Allemagne, en Italie et en Angleterre avec sa sœur Thérèse (1808-1876), qui, très grande, lui sert de partenaire. Elle est engagée en 1834 à l'Opéra de Paris, où elle danse La Tempête en 1834, Don Juan et Le Diable boiteux en 1836 ; dans ce dernier spectacle elle excelle comme danseuse-mime et acquiert une immense popularité en y interprétant la cachucha : « Fanny Elssler est une danseuse païenne [...]. Elle danse de tout son corps, depuis la pointe des cheveux jusqu'à la pointe des orteils [...]. Ce n'est pas la grâce aérienne et virginale de Taglioni, c'est quelque chose de beaucoup plus humain, qui s'adresse plus vivement aux sens [...]. Au bout de ses doigts vermeils tremblent des castagnettes d'ébène. La voilà qui s'avance, elle semble secouer de ses mains des grappes de rythmes. Comme elle se tord, comme elle se plie, quel feu, quelle volupté, quelle ardeur, ses bras pâmés s'agitent autour de sa tête qui penche, son corps se courbe en arrière, ses blanches épaules ont presque effleuré le sol. Quel geste charmant ! Ne diriez-vous pas qu'avec cette main qui rase l'éblouissant cordon de la rampe, elle ramasse tous les désirs et tout l'enthousiasme de la salle ? » (T. Gautier, Les Beautés de l'Opéra). Après ce triomphe, Fanny Elssler se rend à Vienne en 1837, et rentre à Paris dans le courant de l'été, pour danser devant la cour à Compiègne. Le 22 octobre 1838, elle provoque un scandale à l'Opéra de Paris, lors de la reprise du rôle interprété par Taglioni dans La Fille du Danube ; Gautier, présent, semble avoir préféré la nouvelle interprète à l'ancienne, mais tout le monde n'était pas du même avis : « Comme danseuse, Mlle Elssler possède la force, la précision, la netteté du geste, la vigueur des pointes, une hardiesse pétulante et cambrée tout à fait espagnole, une facilité heureuse et sereine dans tout ce qu'elle fait, qui rendent sa danse une des choses les plus douces à regarder ; elle a, en outre, ce que n'avait pas Mlle Taglioni, un sentiment profond du drame : elle danse aussi bien et joue mieux que sa rivale » (Histoire de l'art dramatique en France). Fanny Elssler crée encore à Paris La Tarentule, en 1839, avant de faire ses adieux à l'Opéra le 30 janvier 1840. Elle fait ensuite, de 1840 à 1842, une tournée en Amérique, où elle remporte les plus vifs succès dans les cracoviennes de La Gitana et de La Gipsy. De retour en Europe, elle danse dans plusieurs pays, excepté en France. Elle fait ses adieux définitifs à la scène, à Vienne (où elle reste jusqu'à sa mort), le 21 juin 1851, dans Faust.
Fanny Elssler n'aimait pas la compétition qu'on voulait susciter entre Taglioni et elle, c'est pourquoi elle refusa de participer au Pas de quatre, sorte de tournoi entre quatre rivales, qui eut lieu en 1845 à Londres et dont Perrot avait conçu la chorégraphie : la postérité continue toujours à les opposer, mais la comparaison de Gautier résume tout ce que l'on peut en dire : « Elle est la danseuse aimée des hommes, comme Mlle Taglioni l'était des femmes. » Parmi ces hommes, de nombreux peintres et sculpteurs nous permettent de garder d'elle des images très vivantes.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jane PATRIE : danseuse
Classification
Autres références
-
BALLET
- Écrit par Bernadette BONIS et Pierre LARTIGUE
- 12 613 mots
- 21 médias
...d'éternité, s'invente une danse à la pureté de diamant où s'exprime le secret de la mélancolie. Deux ans plus tard, pour Carlotta, Gautier écrit La Péri. Une autre étoile est apparue en 1834 dans La Tempête de Jean Coralli : Fanny Elssler. Avec ses petits pas serrés qui attaquent les planches, elle est...