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PRESLEY ELVIS (1935-1977)

Ce pourrait être le début d'un roman de Faulkner. Le 8 janvier 1935, Gladys, vingt-trois ans, épouse de Vernon Presley, dix-neuf ans, un petit Blanc surendetté d'East Tupelo, dans le Mississippi, accouche de jumeaux. Le premier, Jesse Garon, est mort-né. Elvis Aaron (ou Aron), le second, se présente une demi-heure plus tard. On peut gloser à l'infini sur les répercussions qu'une naissance aussi tragique a pu avoir sur l'inconscient de celui qui restera un des plus grands mythes de la seconde moitié du xxe siècle.

Rock'n'roll attitude et apothéose américaine

L'enfance d'Elvis fut passablement conformiste, celle d'un élève moyen sans histoires. La vraie vie, de toute façon, est ailleurs, dans la parure et la musique. Dès l'âge de deux ans, il écoute et chante le gospel des Noirs à l'église pentecôtiste. Son oncle lui apprend la guitare quand il a une dizaine d'années, et il brille dans les concours musicaux locaux. Ce qu'il aime, c'est la gomina et les tenues voyantes, un look qui inspirera de fait ses costumes de scène au cours de toute sa carrière. Quand il suit ses parents qui partent s'installer à Memphis, il fréquente un collège où on refuse qu'il fasse partie de l'équipe de football et où on se moque de sa coiffure à la mode des voyous. C'est cependant pour lui l'occasion d'interpréter avec brio, au cours des fêtes scolaires, les succès du tout jeune rock'n'roll, et de jouer de ses talents d'amuseur, qu'il n'abandonnera jamais tout à fait. Il pratique plusieurs métiers – routier par exemple –, mais seuls comptent pour lui le gospel, la country et le rhythm and blues. Il n'a pas vingt ans quand il enregistre, en août 1953 et en janvier 1954, quelques titres dans le studio de Sam Phillips, fondateur de la firme Sun Records. Sans grand succès, mais Phillips comprend qu'il vient peut-être de trouver ce « Blanc qui chante comme un Noir » qui, selon lui, devrait faire sa fortune.

Elvis Presley, 1955 - crédits : Michael Ochs Archives/ Getty Images

Elvis Presley, 1955

Le 5 juillet 1954 se produit le miracle : c'est en faisant le pitre sur That's All Right (Mama) du bluesman Arthur « Big Boy » Crudup, dont il s'amuse à forcer les effets de syncope et qu'il accompagne de forts déhanchements du bassin, qu'il crée sans le vouloir le rockabilly ; ce morceau, suivi de Blue Moon of Kentucky, un titre bluegrass de Bill Monroe, est immédiatement enregistré par Elvis et ses deux amis Scotty Moore (guitare) et Bill Black (basse). Ce disque mythique est commercialisé en 45-tours et en 78-tours le 19 juillet 1954. Pendant les deux années qui vont suivre, celles de la montée en puissance des rockers noirs (Little Richard, Chuck Berry) ou blancs (Jerry Lee Lewis, Bill Haley), Elvis Presley déchaîne l'hystérie des foules par sa voix charismatique, son jeu de scène survolté et ses postures lascives. C'est alors qu'entre en scène le faux « colonel » Tom Parker (en réalité, Andreas Cornelius Van Kuijk), fils de forains au passé trouble, impresario et affairiste plus que douteux qui, à quarante-six ans, entreprend de diriger la carrière du jeune homme de vingt ans avec un redoutable sens du business. Ce départ foudroyant se prolonge de 1956 à 1958. Parker a fait passer Elvis chez R.C.A. Parallèlement à la réédition des morceaux précédents, le chanteur enregistre les grands titres qui, même lorsqu'ils sont empruntés à d'autres artistes, obtiennent un succès phénoménal et contribueront à construire sa légende. C'est sur les albums Elvis Presley et Elvis (tous deux de 1956) qu'on trouve Heartbreak Hotel, Hound Dog, I Got A Woman, Tutti Frutti, Blue Suede Shoes, Blue Moon, Don't Be Cruel, Long Tall Sally, Ready Teddy, Rip It Up, All Shook Up, Don't, Too Much... Les passages à la télévision avec ses choristes, The Jordanaires, se multiplient.[...]

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Elvis Presley, 1955 - crédits : Michael Ochs Archives/ Getty Images

Elvis Presley, 1955

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