- 1. Les procédés
- 2. L'Antiquité celtique et romaine
- 3. Les émaux byzantins sur or cloisonné. Leurs adaptations carolingiennes et ottoniennes (VIe-XIe siècle)
- 4. L'émaillerie romane sur cuivre champlevé et le premier art gothique
- 5. Les émaux translucides de basse-taille et le Trecento
- 6. Les émaux peints à la fin du Moyen Âge et à la Renaissance
- 7. L'émaillerie décorative des orfèvres et joailliers classiques
- 8. Bibliographie
ÉMAUX
Les émaux byzantins sur or cloisonné. Leurs adaptations carolingiennes et ottoniennes (VIe-XIe siècle)
Une émaillerie raffinée, procédant du mode différent du cloisonné sur or, se développait à Constantinople et en des cités d'Asie Mineure. Là, l'émail va prendre dans l'orfèvrerie une place prépondérante qu'il ne perdra qu'à la fin du Moyen Âge ; il ornera, avec une richesse de coloris jusqu'ici inconnue, les objets du culte religieux et impérial. Les pièces antérieures à la crise iconoclaste (viiie-ixe siècle) sont conservées en nombre infime : elles ont subsisté loin de la capitale, en Gaule (reliquaire de sainte Radegonde à Poitiers), en Italie, en Syrie. Des bijoux, tels les bracelets de Salonique ou des plaques de vases précieux, suscitèrent l'émulation des orfèvres carolingiens qui les sertirent en remploi (aiguière de Saint-Maurice d'Agaune), puis les imitèrent en Gaule franque (reliure de l'évangéliaire de Metz, Paris, Bibliothèque nationale), en Aquitaine (reliquaire de Pépin à Conques), dans les Asturies (croix de la Victoire à Oviedo), en Lombardie (paliotto de Sant Ambrogio à Milan), à Rome avec un programme historié de style latin (croix du pape Pascal, Vatican).
À partir du milieu du xe siècle à Byzance, pendant la Renaissance macédonienne, en Géorgie et dans la principauté de Kiev, l'émaillerie atteint une liberté picturale qui égale celle de l'enluminure (staurothèque faite à Constantinople entre 948 et 959, emportée par les croisés à Limbourg sur la Lahn en 1204) ; dans l'Empire ottonien apparaissent simultanément des ateliers mettant en œuvre les mêmes procédés d'exécution au service d'une esthétique voisine et dans des styles apparentés qu'explique la présence d'œuvres et d'artistes grecs à la cour des Otton, unis d'ailleurs à l'empereur byzantin par des relations matrimoniales. L'inspiration iconographique et la maîtrise des moyens font de l'émaillerie grecque l'émule de la peinture et de la mosaïque contemporaines (icônes de l'archange saint Michel à Venise, plaque des Wittelsbach à Munich). Les visions d'une réalité transcendante sont captées par la substance lumineuse des émaux, cristallisées dans les couleurs translucides et l'or d'un espace abstrait. Des motifs venus de l'Iran sassanide et omeyyade introduisent dans l'émaillerie byzantine la symétrie de leurs palmettes et de leur bestiaire héraldique.
Si les ateliers grecs semblent concentrés à Constantinople, leurs concurrents occidentaux sont dispersés de l'Allemagne à l'Italie, là où un patron princier ou ecclésiastique favorise l'établissement d'émailleurs par la fondation d'un trésor, ainsi Egbert à Trèves les abbesses d'Essen, Ramwold à Ratisbonne, saint Gauzlin à Toul, les princes ottoniens à Mayence, Aribert à Milan où une tradition indépendante explique une production originale. La vocation occidentale s'affirme déjà par l'association de reliefs repoussés aux variations chromatiques de l'émail.
Pendant les deux siècles suivants, les ouvrages grecs tendent à la schématisation : l'équilibre de la ligne et de la couleur est détruit au profit du rythme décoratif de silhouettes étirées verticalement et des surfaces striées de cloisons multiples. Les Grecs gardent cependant l'apanage de la qualité et de l'exemple : vers 1000, puis en 1105, Venise compose sa Pala d'oro à l'aide de plaques diverses provenant de Constantinople ; en 1070, l'abbé Didier du Mont-Cassin fait venir des émailleurs de Byzance pour réaliser l'autel de saint Benoît. Ainsi motifs, images, ornements, compositions imprègnent-ils d'un goût byzantin la production occidentale pendant le xiie siècle. Dès cette époque, c'est aussi de Constantinople[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Marie-Madeleine GAUTHIER : chargée de recherche au C.N.R.S.
Classification
Média
Autres références
-
ALICATADO
- Écrit par Colette CROUZET
- 211 mots
-
ALPAIS (1185 env.-env. 1215)
- Écrit par Marie-Madeleine GAUTHIER
- 603 mots
Insculpée à l'intérieur du couvercle d'un ciboire célèbre, une inscription désigne indubitablement un artiste émailleur : Magister G. Alpais me fecit Lemovicarum (Maître G. Alpais m'a fait à Limoges) ; il paraît en effet préférable de traduire ainsi en français le locatif ...
-
ART DE COUR
- Écrit par Philippe VERDIER
- 4 801 mots
- 1 média
...grotesques ont gardé toute leur verve dans les Heures de Savoie pour Blanche de Bourgogne (1348). Dans l'émaillerie de basse-taille parisienne, aux émaux translucides posés sur un fond d'argent faiblement ciselé, l'esthétique de la décoloration et des tonalités claires, qui triomphe dans le vitrail... -
AZULEJOS
- Écrit par Colette CROUZET
- 953 mots
- 2 médias
...L'utilisation de la céramique en plaques de revêtement remonte aux civilisations anciennes du Moyen-Orient (Babylone, la Perse aux environs du Ier millénaire). Mais le terme azulejos désigne d'une manière plus précise les plaques de revêtement à décor émaillé utilisées d'abord à Samarra au ... - Afficher les 35 références