ÉMERAUDE
L'émeraude est la variété verte et limpide du béryl, un cyclosilicate de béryllium. Elle est une des quatre pierres précieuses avec le diamant, le rubis et le saphir, ces deux derniers étant les variétés gemmes du corindon. Sa dureté, son habitus (forme cristalline) en cristaux prismatiques hexagonaux et allongés, lisses ou finement striés selon l'allongement, ses fréquentes inclusions et sa couleur verte incomparable permettent de distinguer aisément l'émeraude des autres pierres offrant une certaine ressemblance, tels que le péridot, le diopside, la dioptase, l'hiddénite, la démantoïde et l'uvarovite.
Le mot latin smaragdus, du grec smaragdos, signifiant « pierre verte », a donné ultérieurement les termes émeraude, esmeralda en espagnol, smeraldo en italien, emerald en anglais, et smaragd en allemand. Jadis, on appelait émeraude de nombreuses pierres vertes.
Exploitée depuis l'Antiquité, l'émeraude est chargée de symbolisme et de vertus qui en firent une pièce recherchée par tous les dignitaires des époques passées. D'un point de vue minéralogique, l'émeraude est aussi une pierre d'exception car elle renferme à la fois des éléments présents dans la croûte terrestre superficielle et des éléments issus des profondeurs du manteau terrestre. Cette présence simultanée d'éléments chimiques normalement dissociés est longtemps restée une énigme pour les géologues ; ce n'est qu'au début des années 1990 que différentes études ont permis de lever le voile sur la formation des éléments et donc de mieux discerner les vrais gemmes des imitations et des émeraudes synthétiques.
La structure cristalline de l'émeraude
L'émeraude est un cyclosilicate d'aluminium et de béryllium de formule Al2Be3(Si6O18). Elle cristallise dans le système hexagonal, sa dureté varie de 7,5 à 8 et son poids spécifique de 2,67 à 2,78. De transparente à opaque, elle présente un éclat vitreux et une cassure légèrement conchoïdale, inégale.
Comme chez les autres béryls, le motif élémentaire de l'émeraude est un anneau de six tétraèdres de silice (SiO44—), dont chacun possède deux sommets libres, ce qui correspond à la formule (Si6O18)12—. Les anneaux constitutifs s'empilent selon l'axe c de symétrie 6 du cristal ; les ions aluminium (Al3+) et béryllium (Be2+) s'intercalent entre les anneaux de silice et assurent la cohésion de l'ensemble. L'aluminium est en partie remplacé par du chrome (Cr3+) et du vanadium (V3+), éléments qui donnent la couleur verte à l'émeraude, ainsi que, plus rarement, par du magnésium (Mg2+) et du fer ferrique (Fe3+). Parfois du lithium (Li+) remplace le béryllium tandis que de l'aluminium peut se substituer au silicium (Si) des anneaux (fig. 1).
Cette structure ménage des « canaux » au cœur ou entre les anneaux de silice, laissant la place à des ions alcalins – sodium (Na+), potassium (K+), lithium (Li+), césium (Cs+) – ou à des éléments volatils (eau, dioxyde de carbone, gaz rares). D'autres inclusions peuvent cristalliser dans la charpente silicatée au cours de la paragenèse : micas, trémolites, actinotes, etc. On appelle « givres » ces inclusions ; ainsi, le « givre de guérison » est une fissure in situ cicatrisée par des substances externes provenant du milieu ambiant ou des solutions hydrothermales. Plusieurs givres forment le « jardin » d'une émeraude.
On comprend ainsi que l'étendue des possibilités de substitutions d'éléments chimiques et des variations d'incorporation de givres caractérise chaque type d'émeraude : loin d'être considérées comme des défauts, ces associations donnent au contraire une carte d'identité à chaque gemme, garantissant son authenticité dès lors que l'on a compris les modes de formation des divers gisements.[...]
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Écrit par
- Yves GAUTIER
: docteur en sciences de la Terre, concepteur de la collection
La Science au présent à la demande et sous la direction d'Encyclopædia Universalis, rédacteur en chef de 1997 à 2015
Classification
Médias
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