GUPTA EMPIRE
La famille Gupta semble avoir eu pour berceau le Magadha, nom donné autrefois à la région de Patna (État de Bihār). Elle s'illustra peu avant le milieu du iiie siècle après J.-C. Ayant réussi à mettre fin à la confusion qui régnait en Inde depuis que des envahisseurs occidentaux, implantés au nord-ouest du pays aux alentours de l'ère chrétienne, avaient progressé vers le centre, elle édifia un puissant empire englobant à son apogée (320-455 env.) les contrées situées entre la chaîne de l'Himālaya au nord et le fleuve Narmadā au sud. D'une défaite que lui infligèrent les Huns Blancs ou Hephtalites en 510 ( ?) date vraisemblablement le déclin de la dynastie qui survécut néanmoins jusqu'à la fin du viie siècle.
La période Gupta est regardée à juste titre comme l'« âge d'or » de la culture indienne. Le brahmanisme – religion traditionnelle des hindous, issue du védisme – et le bouddhisme coexistaient alors harmonieusement. Le premier, tout en reconnaissant la prééminence des textes védiques, diffusait jusqu'aux royaumes indianisés du Sud-Est asiatique les Upaniṣad et les épopées, élaborait la littérature « illimitée » des Purāṇa et les Tantra, et préparait les voies de la spéculation philosophique. Le second voyait se développer de nombreuses écoles et attirait en Inde des pèlerins étrangers. Et tandis que, sous l'influence du Mahāyāna, s'affirmait un mouvement de dévotion, la pensée de ses grands docteurs – Asanga, Vasubandhu, Dignāga – se répandait largement à travers le continent.
C'est à la cour des Gupta, princes de souche purement indienne, que se trouvèrent réunies les conditions propices à l'éclosion d'une littérature. Les ouvrages de Kālidāsa – et tout particulièrement Sakuntalā, le chef-d'œuvre de la littérature dramatique indienne – illustrent le degré de perfection atteint par la langue sanskrite. En même temps, les arts plastiques parvenaient à l'équilibre de la maturité. Sentiment religieux profond, maîtrise technique, pureté des formes et raffinement du décor caractérisent le style Gupta proprement dit, dont la production s'échelonne du milieu du ive au milieu du vie siècle après J.-C.
Cette harmonie et cette robustesse classiques persisteront dans les œuvres de style « post-Gupta » réalisées par les diverses écoles du Nord et du Centre. Mais, de même que l'expression littéraire se teinte assez tôt d'affectation, l'architecture, la sculpture et la peinture montrent dès la fin du viie siècle une tendance à la préciosité et à la surcharge qui se généralisera après le milieu du viiie siècle.
Naissance et apogée de l'empire Gupta
Śrī Gupta, roitelet assez obscur, passe pour avoir fondé la dynastie qui porte son nom. Son petit-fils, Candragupta Ier (prononcer « Tchandragoupta »), donna à cette dernière un éclat durable. Le mariage de Candragupta avec une princesse de la maison des Licchavi, dont la domination sur la région de Vaiśālī est attestée dès le ve siècle avant J.-C., est sans doute à l'origine de sa fortune. Souverain d'un territoire resté, grâce à sa position géographique, hors de portée des Occidentaux (Saka, Kṣahārata, Kuṣāṇa), il devait – tout comme le Candragupta de la dynastie Maurya, roi de Magadha à la fin du ive siècle avant J.-C. et grand-père d'Asóka, le premier unificateur de l'Inde – incarner en quelque sorte la réaction indienne face aux étrangers, et faire du Magadha le noyau d'un État unifié. L'année de son avènement (319/320) fut le point de départ d'une ère demeurée en vigueur jusqu'au xiiie siècle dans l'Inde centrale et au Népāl. Afin de marquer l'accroissement de sa puissance, il abandonna le titre de « roi » de ses prédécesseurs pour se donner celui d'« empereur ».[...]
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Écrit par
- Rita RÉGNIER : chargée de recherche au CNRS, chargée de mission au Musée national des arts asiatiques-Guimet
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