OTTOMAN EMPIRE
Édifié lentement, au début du xive siècle, sur les ruines de l'État seldjoukide d'Anatolie, puis, au xve siècle, sur celles de l' Empire byzantin, l'État ottoman, après la prise de Constantinople (29 mai 1453), est devenu l'une des puissances majeures de l'Europe et du Proche-Orient. Bien administré, doté d'une armée solide, il a constitué au xvie siècle et pendant une partie du xviie une menace sérieuse et constante pour les puissances européennes. Maître de la Méditerranée, de l'Afrique du Nord, de l'Europe balkanique, des pays du Proche-Orient et des rives de la mer Noire, il est le dernier des grands empires du Vieux Monde et peut être considéré comme le successeur des empires romain, byzantin et arabe. Sa domination politique, plus libérale et plus tolérante qu'on ne l'a dit, s'accompagne d'une floraison intellectuelle, et artistique, qui vaut au règne de Soliman le Magnifique une réputation justifiée.
Faute d'avoir voulu ou d'avoir su s'adapter aux conditions nouvelles de l'économie européenne, et plus spécialement de l'industrie, entouré de voisins, la Russie en particulier, jaloux de sa puissance, l'Empire ottoman a connu à partir du xviiie siècle des revers qui l'ont amené à subir la loi de l'Occident sur le plan économique puis sur le plan politique. La « question d'Orient », au xixe siècle, a essentiellement consisté dans la recherche, par quelques États européens, du démembrement de l'Empire et dans le partage de ses dépouilles. Cette entreprise a réussi presque totalement. Cependant, grâce à Mustafa Kemal, le territoire anatolien a pu être préservé et la création de la Turquie nouvelle, en 1923, a marqué du même coup la fin de l'Empire ottoman.
Les origines et les débuts de l'Empire ottoman
Le sultanat turc seldjoukide d' Asie Mineure (ou Anatolie) avait réussi à établir, dans le courant du xiie siècle, sa domination sur la majeure partie de la péninsule anatolienne, ne laissant aux Byzantins que son extrémité occidentale. Après une période très brillante durant le premier tiers du xiiie siècle, il s'est ensuite trouvé confronté à plusieurs problèmes graves qui ont précipité sa disparition. Dès avant le milieu du xiiie siècle, des querelles de succession entamèrent l'unitarisme et la centralisation du gouvernement, entraînant un affaiblissement du pouvoir au moment où il devait faire face à l'invasion des Ilkhāns mongols, héritiers, au Proche-Orient, de l'empire de Gengis khān. Victorieux, les Mongols imposèrent leur protectorat à toute la partie orientale de l'Anatolie ; ailleurs, les querelles intestines et les intrigues des vizirs contribuèrent à anéantir l'autorité des sultans. Dans cet État en déclin apparaissent alors les tribus turcomanes que les souverains seldjoukides avaient, un siècle auparavant, installées au fur et à mesure de leur arrivée sur le limes byzantino-turc : il s'agissait de tribus ou de groupes de tribus plus ou moins bien assimilés au monde turco-musulman et ayant conservé un esprit offensif que les sultans s'efforçaient de diriger contre l'Empire byzantin. En outre, elles étaient animées de sentiments religieux musulmans, encore imprégnés il est vrai de chamanisme et, sous l'impulsion de chefs de confréries, leur prosélytisme de néophytes les conduisait volontiers à s'engager dans la lutte contre les chrétiens.
De petits émirats autonomes (XIIIe siècle)
Profitant de la désintégration du pouvoir seldjoukide, ces tribus constituèrent, sur le pourtour du sultanat et plus particulièrement à l'ouest, des émirats autonomes (beylik) qui devinrent totalement indépendants à la fin du xiiie siècle. Les émirats de l'ouest ont pour objectif la conquête des territoires byzantins ; ceux du centre[...]
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Écrit par
- François GEORGEON : directeur de recherche émérite au C.N.R.S.
- Robert MANTRAN : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Provence-Aix-Marseille-I
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