OTTOMAN EMPIRE
De l'émirat à l'Empire (1362-1451)
Des organisateurs, vainqueurs des chrétiens
Murad Ier (ou Murat, 1362-1389) est le véritable créateur de la puissance ottomane en Europe orientale : son règne est en effet marqué par la prise d'Andrinople dès 1363, suivie de l'occupation de la Macédoine, de la Thrace orientale et de la Bulgarie. À plusieurs reprises, avec des sorts divers, il se heurte aux Serbes : au cours de la dernière bataille livrée contre eux, à Kossovo (13 juin 1389), il est assassiné, mais les Serbes sont vaincus. En Anatolie, il a défait et rejeté vers l'est les émirs de Karaman, principaux rivaux des Ottomans, et acquis les territoires frontaliers des Karamanides. Mais, surtout, il a jeté les bases d'un grand État : mise en place d'une administration centralisée (le divan), aux bureaux diversifiés et à la tête de laquelle se trouve le Grand Vizir ; création pour son armée d'un système de recrutement qui puise les futurs janissaires parmi les enfants des foyers chrétiens des Balkans, d'où ils sont envoyés en Anatolie pour être islamisés, turquisés et instruits dans le métier des armes ou, le cas échéant, dans le service du palais : ce sont les adjémioghlan. Le contrôle des pays conquis est assuré par l'attribution, à titre viager et personnel, de terres de plus ou moins grandes dimensions (timar, ziyamet) à des militaires responsables de leur mise en valeur et de la levée d'un nombre déterminé de soldats auxiliaires. L'affirmation de la transformation de l'État ottoman apparaît dans la titulature de Murad Ier : alors qu'Orkhān portait le titre d'émir ou encore celui de bey, Murad, au cours des dernières années de son règne, s'intitule sultan, ce qui est le témoignage d'une dignité plus élevée.
Son fils Bayézid Ier (Bāyazīd) surnommé Yildirim (la Foudre), après avoir annexé tous les émirats turcs d'Anatolie occidentale et centrale, à l'exception de celui de Karaman, poursuit l'œuvre de conquête en Europe balkanique, et favorise même l'accession au trône byzantin de Manuel II à la mort de Jean V (1391) ; ce qui ne l'empêche pas d'entreprendre peu après le siège de Constantinople. Les progrès des Turcs entre 1393 et 1395 ayant amené ceux-ci aux frontières de la Hongrie, le roi de ce pays, Sigismond, lance en Occident un appel à la croisade que le pape Boniface IX encourage vivement : Français, Anglais, Allemands, quelques Italiens, se joignent aux Hongrois pour attaquer les Turcs et les chasser d'Europe. Le choc se produit le 25 septembre 1396 à Nicopolis et s'achève par l'écrasement complet des croisés : cette défaite a un profond retentissement en Europe et donne naissance à la réputation de force, voire d'invincibilité, des Turcs.
Défaite devant Tamerlan
Pourtant cette invincibilité devait être infirmée peu après. En effet, dans les dernières années du xive siècle, une menace avait plané sur l'Anatolie orientale : elle provenait des troupes mongoles de Tamerlan (Tīmūr Leng), le maître de l'Asie centrale, prétendu descendant de Gengis khān, qui peu à peu avait mis sous contrôle l'Iran et l'Irak. De son côté, Bayézid avait occupé les territoires de l'Anatolie nord-orientale et se trouvait ainsi face à Tamerlan. L'affrontement n'a lieu qu'en 1402 : le 20 juillet, à Ankara, Bayézid est vaincu par Tamerlan et est fait prisonnier ainsi que l'un de ses fils, cependant que Tamerlan reconstitue les émirats que Bayézid avait annexés : l'État ottoman perd ainsi toutes ses conquêtes en Anatolie ; mais, fait plus grave, les fils du sultan ottoman se disputent son héritage, et il s'ensuit dix ans de guerres intestines dont sort finalement vainqueur Mehmed Ier (Mehmet), en 1412.
Sur le continent asiatique, où les Karamanides[...]
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Écrit par
- François GEORGEON : directeur de recherche émérite au C.N.R.S.
- Robert MANTRAN : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Provence-Aix-Marseille-I
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Médias
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