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EN THÉRAPIE, série télévisée

Singularités nationales

Diffusés quotidiennement en Israël et aux États-Unis (du lundi au vendredi), les épisodes d’En thérapie l’ont été par lots de cinq, tous les jeudis soir sur Arte (35 épisodes). Une semaine avant son lancement, la série a également été mise en ligne intégralement sur la plateforme arte.tv, ce qui lui a permis de cumuler 36,5 millions de vues en six semaines et de devenir la série la plus regardée de l’histoire de la chaîne franco-allemande. Ce succès retentissant n’a pas empêché Elkaïm et Poymiro d’annoncer leur refus de prendre part à l’écriture d’une deuxième saison. Le motif ? Un refus, de la part de l’équipe de production, de les créditer d’une direction artistique ou d’une coproduction. Si, aux États-Unis, les scénaristes en chef cumulent généralement les fonctions de showrunner et de producteur exécutif, la télévision française tend encore à dresser des barricades entre producteurs, scénaristes et réalisateurs. À ce titre, Éric Toledano et Olivier Nakache, les deux créateurs de la série (qu’ils ont également réalisée en alternance avec Pierre Salvadori, Nicolas Pariser et Mathieu Vadepied), ont obtenu le final cut, c’est-à-dire la décision finale sur le montage, et assuré l’essentiel de la promotion de cette adaptation française.

Au-delà de ces atermoiements, on notera que l’écriture d’En thérapie, dans son approche de la psychanalyse, relève davantage de la théorie que de la pratique – surtout si on la compare à celle de la version américaine, In Treatment (2008-2010), ramenée à la vie à l’occasion d’une quatrième saison diffusée sur HBO en 2021. Le quatrième épisode d’In Treatment se sert d’une allusion insultante à Roland Barthes (« that pretentious fag ») pour révéler à la fois l’érudition secrète et l’homophobie patente de Jake, mari jaloux qui ne supporte pas l’idée que son épouse veuille avorter. Dans la version française, le docteur Dayan, lui, se réfère volontiers à Jacques Lacan, qu’il cite en déclarant : « Je vais vous parler de structure et de position, comme cet auteur, Lacan, que vous avez donc lu. » Le spécialiste français parle comme un « psy », en brossant ce qu’il qualifie lui-même de « tableaux cliniques », là où son homologue américain n’hésite pas, tel un disciple de John Cassavetes, à lutter avec ses patients, à bousculer leurs convictions selon un principe de thérapie active fondé sur une perception dynamique de l’empathie. Une différence d’approche qui mériterait bien quelques séances d’analyse supplémentaires.

Ce sera le cas avec la diffusion, au printemps de 2022, d’une deuxième saison développée par Éric Toledano et Olivier Nakache, après le départ de David Elkaïm et Vincent Poymiro. Un changement qui s’est avéré toutefois préjudiciable à l’avenir de la série, puisqu’il a été annoncé que celle-ci ne connaîtrait pas de troisième saison en raison des envies de cinéma de son nouveau duo de maîtres à penser.

— Benjamin CAMPION

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Écrit par

  • : docteur en études cinématographiques et audiovisuelles, enseignant contractuel à l'université Paul-Valéry-Montpellier III

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