Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ENFANCE, Nathalie Sarraute Fiche de lecture

Enfance est un texte autobiographique de Nathalie Sarraute (1900-1999) paru en 1983. L'auteure, dont le premier livre, Tropismes (1939), est passé complètement inaperçu, a rencontré tardivement le succès. Elle se fait d'abord connaître par un ouvrage critique, L'Ère du soupçon, en 1956. Alors associée un peu artificiellement au « nouveau roman », elle commence par explorer de nouvelles voies romanesques dans des récits – Portrait d'un inconnu (1948), Martereau (1953), Le Planétarium (1959), Les Fruits d'or (1963) – qui lui valent une reconnaissance critique et un début de notoriété. À partir de 1964, ses pièces de théâtre – Le Silence (1964), Le Mensonge (1967), C'est beau (1975), Elle est là (1978), Pour un oui pour un non(1982) – lui permettent d'atteindre un plus large public. Parallèlement, elle continue de publier des récits inclassables – Disent les imbéciles (1976), L'Usage de la parole (1980) –, de plus en plus centrés sur la question du langage. Son entrée en 1996, de son vivant, dans la Bibliothèque de la Pléiade, vient consacrer une œuvre profondément originale et d'une grande constance aussi bien formelle que thématique. À cet égard, bien que constituant la seule incursion explicite de l'auteure dans le champ autobiographique, Enfanceentre en parfaite résonance avec ses autres livres, à commencer par le premier, fondateur, Tropismes.

Une enfance morcelée

Enfance est divisé en soixante-dix chapitres, la plupart brefs (une ou deux pages), quelques-uns un peu plus longs (jusqu'à douze pages). Le premier est à la fois une introduction – un débat intérieur sur le projet autobiographique – et le début de la remémoration proprement dite. La transition s'opère par l'association entre les réserves sur l'entreprise (« Alors, tu vas vraiment faire ça ? ») et le souvenir d'un interdit et d'une menace (« Non, tu ne feras pas ça »). Suit une série d'évocations de l'enfance de l'auteure – ici confondue, conformément au « pacte autobiographique », avec la narratrice et le personnage –, entre ses « cinq ou six ans » et ses onze ans.

Les chapitres sont à leur tour composés de bribes de récits, ponctuées d'interventions de l'« autre voix », et divisés par des blancs. Deux grandes périodes se succèdent. Dans la première, la petite fille vit à Paris, avec sa mère et son beau-père. Les rapports avec la mère sont complexes et difficiles, entre admiration, déception, crainte et culpabilité. Pendant les vacances, elle se rend fréquemment en Russie, chez des oncles maternels ou, une fois, chez ses grands-parents paternels. Il arrive également que son père vienne la voir à Paris. Lors de l'un de ces séjours, il lui présente sa compagne, Véra. La seconde période s'ouvre avec un retour de Russie en compagnie de sa mère, qui lui annonce qu'elle ne l'accompagnera pas à Paris et qu'elle y vivra désormais avec son père. Bientôt, Véra accouche d'une petite fille, Hélène, surnommée Lili. Le « fantôme » de la mère reste longtemps présent. Mais l'enfant grandit, entourée d'exilés russes, apprend à lire et à écrire, découvre avec passion l'école, où elle brille. Elle reverra une fois sa mère, brièvement, dans une chambre d'hôtel. Un chapitre d'anticipation nous apprend également qu'elle revivra un temps avec elle, trois ans plus tard, à Saint-Georges-de-Didonne, avant que celle-ci ne parte de nouveau brutalement après la déclaration de la guerre. Les souvenirs se terminent, avec l'enfance, à l'entrée au lycée Fénelon.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Autres références

  • ROMAN D'ÉDUCATION ou ROMAN D'APPRENTISSAGE

    • Écrit par
    • 1 484 mots
    ...l'enfance et de l'adolescence, qui est toujours roman d'une éducation et qui, comme genre, s'est développée parallèlement au roman en subissant son influence (ainsi Enfance, de Nathalie Sarraute) ; d'autre part, le traité pédagogique (Rousseau avait intitulé son Émile : « roman »). La fiction romanesque...
  • ROMAN - Le nouveau roman

    • Écrit par
    • 4 675 mots
    • 1 média
    ...l'heure des bilans), mais aussi comme un désir de jouer avec les limites du vrai et du faux et de s'interroger sur les pièges de la mémoire : l'illustrent Nathalie Sarraute avec Enfance (1983), Alain Robbe-Grillet avec sa trilogie autobiographique intitulée Romanesques (1985-1994), ou encore Claude Simon...
  • SARRAUTE NATHALIE (1900-1999)

    • Écrit par
    • 2 476 mots
    • 1 média

    Si l'on peut faire remonter au recueil de L'Ère du soupçon, paru en 1956, le rayonnement de l'œuvre de Nathalie Sarraute, l'une des plus neuves et des plus marquantes de notre époque, c'est parce que s'y trouve alors abordée pour la première fois l'idée d'une crise du roman, idée partagée...