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ENFANCE (Situation contemporaine) L'enfant dans la société de consommation

On assiste à une évolution du rôle des enfants dans les pratiques de consommation familiale en raison de la modification de la structure et de la fonction de la famille, mais aussi de l'évolution des pratiques marketing des entreprises qui tendent à considérer l'enfant comme un consommateur à part entière. L'enfant acquiert des pouvoirs dont il ne disposait pas auparavant et qui peuvent s'envisager de deux façons : tout d'abord le pouvoir économique de l'enfant-acheteur qui dispose d'un budget, ensuite le pouvoir idéologique de l'enfant-prescripteur. Il peut ainsi souvent anticiper ou modifier, de façon très significative, les choix de consommation de sa famille.

L'enfant est donc de plus en plus précocement autonome. Il devient un véritable partenaire économique qui dispose d'un pouvoir consultatif voire décisionnel dans le cadre des achats familiaux. La consommation ne représente plus uniquement le creuset de valeurs opérantes transmises par la famille (qu'acheter ? comment se servir des produits ?) mais renvoie désormais à des pratiques qui permettent à l'enfant de construire son identité à l'intérieur comme à l'extérieur de la famille. Néanmoins, l'autonomisation du statut de l'enfant-consommateur est ambiguë : elle signifie tour à tour l'éclosion de pouvoirs qui ne lui étaient pas dévolus auparavant et sa possible instrumentalisation par les marques, tentées d'utiliser l'enfant comme clé d'entrée dans la famille et donc comme levier d'achat. C'est au cœur même de ce paradoxe que se situe la question des pouvoirs de l'enfant-consommateur.

Les âges de l'enfant-consommateur

L'enfant et les marques - crédits : Sean Gallup/ Liaison/ Getty Images News/ AFP

L'enfant et les marques

L'enfant ne naît pas consommateur. Son désir d'obtenir des produits provient du développement de ses capacités cognitives et sensori-motrices, ainsi que de son immersion dans un univers social et culturel. En regardant agir leurs parents, en observant leurs pairs dans la cour de récréation ou encore en regardant la télévision, les enfants prennent mimétiquement et graduellement conscience que la consommation d'un produit constitue souvent une réponse appropriée à l'émergence d'un désir et qu'il faut, par exemple, « avoir deux chewing-gums dans la bouche plutôt qu'un seul, car cela permet de faire des plus grosses bulles » comme le note le consultant marketing James Mac Neal. Le rôle et le pouvoir de l'enfant-consommateur dépendent essentiellement de l'âge qui influe sur le développement de ses capacités cognitives, sur son degré de socialisation et d'ouverture aux autres et enfin sur l'affirmation de sa personnalité et le développement de son autonomie. Jusqu'à l'âge de deux ans, l'égocentrisme de l'enfant l'empêche de se représenter un produit sous plusieurs angles ; ce dernier n'est perçu que par rapport aux expériences sensorielles et motrices qu'il développe avec lui. Même si l'enfant est capable, dès trois ans, de formuler des préférences, l'apprentissage des produits et des marques se fait essentiellement de façon sensorielle jusqu'à quatre ans. Les produits sont perçus par rapport à leurs formes (rondes, anguleuses), leurs couleurs, leur texture (rugueux, lisse). Jusqu'à cet âge, l'enfant n'utilise guère plus d'un critère pour évaluer un produit, tandis qu'à partir de cinq ou six ans, la comparaison entre plusieurs produits peut se faire sur des attributs plus abstraits tels que le goût ou la fonctionnalité. À partir de six ans, les enfants sont capables de citer au moins un nom de marque par catégorie de produits. Ainsi, d'après une étude menée aux États-Unis, la moitié des demandes de jouets ou jeux comportent des produits dont la marque est indiquée et plus des trois quarts des listes adressées au père Noël mentionnent au moins une marque.[...]

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L'enfant et les marques - crédits : Sean Gallup/ Liaison/ Getty Images News/ AFP

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