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ENFANCE (Situation contemporaine) Le droit de l'enfant

Un défi permanent : la délinquance juvénile

Souvent remaniée, aujourd'hui menacée, l'ordonnance du 2 février 1945 est encore le texte qui régit le traitement de la délinquance juvénile en France.

Les principes de l'ordonnance

Héritiers, à travers la Défense sociale nouvelle, des idées de l'école criminologique italienne, notamment celles d'Enrico Ferri, les rédacteurs de l'ordonnance étaient convaincus que la délinquance des mineurs est totalement déterminée par un certain nombre de causes qu'il faut découvrir avant de les traiter ; pour eux l'acte délictueux était avant tout un symptôme à déchiffrer ; ils ont donc donné priorité à l'étude de la personnalité et de l'entourage du délinquant et se sont écartés du droit pénal des majeurs régi par la philosophie de Bentham selon laquelle l'individu rationnel, libre et transparent à lui-même mérite une rétribution proportionnée à ses actes.

Le franchissement des seuils d'âge : 13, 16 et 18 ans permettait de faire évoluer la situation juridique du mineur de l'irresponsabilité complète à la responsabilité entière et de moduler la réaction de la société de la façon suivante :

– mesures éducatives au-dessous de treize ans ;

– mesures éducatives ou peines de treize à seize ans, le plafond pour ces dernières étant la moitié de celui prévu pour les adultes ;

– entre seize et dix huit ans, la juridiction pouvait écarter le bénéfice de cette atténuation.

Ce régime spécial s'accompagnait d'un casier judiciaire aménagé pour ne pas obérer l'avenir.

La réponse judiciaire était exclusivement confiée à un magistrat spécialisé , le juge des enfants siégeant seul, en chambre du conseil, quand la réponse devait rester purement éducative, et au sein d'une juridiction collégiale qu'il présidait, le tribunal pour enfants, lorsqu'une sanction pénale était envisagée. La primauté de la voie éducative se concrétisait par une mesure de suivi en milieu ouvert, la liberté surveillée et des prises en charge institutionnelles dans des internats et des foyers dépendant du ministère de la Justice. Le système a fonctionné sans s'attirer de véritables critiques jusqu'au début des années 1980.

Mais l'accroissement brutal de la délinquance juvénile et la mise en œuvre pour s'en prémunir de la politique de la ville se sont accompagnées d'une désaffection à l'égard de l'approche individuelle essentiellement psychologique pratiquée jusqu'alors, ouvrant la voie à un changement radical d'attitude et au retour d'une conception classique de la sanction.

Nouvelle philosophie pénale

Aujourd'hui, la philosophie du législateur se résume en trois points. En premier lieu, tout comportement susceptible de qualification pénale, fût-il une peccadille, doit être judiciairement puni. En deuxième lieu, la rapidité de la condamnation est une condition nécessaire de son efficacité. En troisième lieu, il n'y a pas d'éducation possible sans menace, et de sanction sans possibilités d'enfermement.

En conséquence, le législateur accroît indéfiniment les pouvoirs du parquet et réoriente les équipements ; d'où la création successive de centres de placement immédiat (C.P.I.), de centres à encadrement renforcé (C.E.R.), de centres d'éducation fermés (C.E.F.), et bientôt d'établissements pénitentiaires pour mineurs (E.P.M.). La même philosophie a inspiré les multiples modifications récentes du texte de 1945 : lois du 9 novembre 2002, du 9 mars 2004, du 12 décembre 2005 sur la récidive, loi du 5 mars 2007 dite de prévention de la délinquance introduisant la présentation immédiate, la composition pénale, le contrôle judiciaire pour les mineurs de moins de seize ans et autorisant le tribunal pour enfants à ne pas appliquer[...]

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