ENKIDU
Dans la tradition suméro-accadienne, Enkidu est le compagnon du roi Gilgamesh en certains de ses exploits. Dans le cycle sumérien, ils vont ensemble conquérir la Forêt des cèdres, gardée par le monstre Humbaba et tuer le Taureau céleste. Dans un autre poème, Enkidu descend aux enfers, où il est retenu prisonnier ; mais grâce à un trou ménagé dans le sol, il peut sortir répondre aux questions que lui pose son roi sur l'au-delà.
Selon l'Épopée de Gilgamesh, écrite en accadien et qui fond les éléments autonomes anciens en une œuvre structurée, Enkidu joue alors un rôle important dans l'intrigue ; il y est désormais l'ami et non plus le serviteur de Gilgamesh ; le récit comporte une préhistoire : les dieux décident un jour de créer un héros, pour lutter avec Gilgamesh, roi d'Uruk, dont l'activité fébrile épuise les sujets — ce sera Enkidu. Homme-bête, il vit avec les gazelles, broute l'herbe et court la steppe. Il détruit les pièges posés par les chasseurs. Gilgamesh, ainsi averti de son existence, propose un stratagème pour s'emparer de lui : le faire tenter par une courtisane. Enkidu découvre avec elle son humanité et la civilisation. Les animaux le fuient. Il accepte d'aller rivaliser à Uruk avec le roi, dont la tyrannie le bouleverse. Après une lutte épique, les deux adversaires deviennent inséparables.
Le poète reprend à cet endroit les thèmes sumériens, mais Enkidu est désormais guide et même oniromancien. La Forêt des cèdres conquise et le Taureau abattu, les dieux décident de punir les deux amis, mais en la personne seule d'Enkidu. Frappé de délire, celui-ci maudit ceux qui l'ont enlevé à sa vie sauvage ; il agonise longtemps, puis meurt. Gilgamesh lui élève une statue et, épouvanté par la lente et irrésistible désagrégation du cadavre, part à la recherche de l'immortalité, recherche à laquelle est consacré le reste de l'épopée. Enkidu réapparaît dans le douzième et dernier chant : ajout maladroit au corps de l'œuvre, qui constitue un retour en arrière et se contente de traduire la descente aux enfers sumérienne.
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Écrit par
- Daniel ARNAUD : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (section des sciences religieuses) Paris
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