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ENNÉADES, Plotin Fiche de lecture

Les Ennéades (de enneas, le chiffre neuf en grec) ne constituent pas à proprement parler une œuvre de Plotin (205-270), mais la bibliothèque plotinienne : c'est en effet le nom donné au rassemblement par Porphyre, après la mort du maître, de cinquante-quatre traités ou conférences d'importance variable, en six ensembles thématiques de neuf titres chacun : le monde humain, le monde physique, le destin, l'âme, l'intelligence, l'Un. Un exposé des Ennéades, dont l'organisation suivant des raisons pédagogique et numérologique n'a aucune valeur organique (ainsi le Contre les gnostiques s'y trouve dispersé en quatre « traités »), revient donc à exposer la pensée plotinienne elle-même. Or ce que cette pensée – le néo-platonisme – a en propre, c'est d'abord une théorie de l'Un.

Connaissance du réel et destinée de l'âme

Déjà, pour les stoïciens, le degré de réalité d'un être correspond au degré d'union de ses parties. Mais pour Plotin cette union provient nécessairement de la contemplation d'un être supérieur, aussi faut-il supposer au principe l'Un, absolument indéterminé, et donc « au-dessus de l'essence », selon les termes de Platon (Parménide). L'être ne vient qu'en second, par émanation ou « procession » : la surabondance de l'Un produisant comme malgré soi une réalité semblable à lui, mais qui en diffère assez pour le contempler. L'originalité de Plotin, s'inspirant ici d'Aristote, est de ne pas confondre l'intelligible avec l'Un, mais avec ce qui est ; et de l'identifier à l'intelligence, au lieu que dans le platonisme l'intelligible la précède nécessairement. De même que l'intelligence est vision de l'Un, l'âme à son tour est vision de l'idée, qui informe la matière – ultime reflet de l'être avant l'évanouissement dans le non-être. En ce sens, la matière est à l'origine du mal (c'est la thèse du huitième traité de la première Ennéade), des maux compris comme perte de réalité : la maladie, la laideur, la pauvreté. Car l'âme peut se laisser attirer vers la matière, détourner du modèle par l'attrait du reflet.

Inversement, en partant cette fois du monde sensible, le néo-platonisme conçoit un mouvement ascensionnel, qui conduit à l'Un. La description plotinienne de cette ascension a eu une considérable influence dans ce qu'il est convenu d'appeler la théologie mystique : elle constitue une pièce majeure dans la part d'« hellénisme » que recèle la pensée chrétienne. Au plus bas de l'échelle l'âme subit, elle est passive ; avec la vie sociale elle accède au premier degré de l'action. Vient ensuite pour l'âme, avec le jugement et la conscience rationnelle, le stade de la maîtrise de soi. Mais elle ne s'en tient pas là et, se dépassant elle-même, peut atteindre l'intelligence. Plus rarement encore, au-delà non seulement du discours mais aussi de la vision intellectuelle et de l'intuition, il peut lui être donné d'entrer en contact avec l'Un : c'est l'expérience de l'extase, où le sujet et l'objet, le connaissant et le connu, se confondent. Il ne s'agit plus alors à proprement parler de connaissance ; le langage est inapte à dire cette fusion, et le philosophe doit forger ici des tournures particulières comme l'usage de la négation, qui sera repris dans la théologie négative (apophatisme) du pseudo-Denys

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