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ENSEIGNEMENT DE L'ART

L'héritage doctrinal

Ce qui n'était, à la Renaissance, qu'un jeu intellectuel entre les diverses sensibilités artistiques italiennes va devenir un enjeu pour un pouvoir qui tend vers le monopole des modes de représentation et de l'enseignement, vers la centralisation et la mise en place d'un art d'État. La France en sera fortement marquée au xviie siècle et en gardera une structure éducative qui la distingue encore actuellement de ce qui est pratiqué à l'étranger en matière de formation artistique.

Dans le cadre académique institué en 1648 et renforcé par le pouvoir de Louis XIV, devenu effectif à partir de 1661, il ne s'agit plus seulement de reproduire les théories en cours sur la Beauté, en peinture ou en sculpture, mais de susciter un débat d'idées. Bien qu'il soit toujours convenu que l'objet de l'Art est l'imitation de la Nature, il semble désormais admis que la peinture puisse rivaliser avec elle et même la corriger pour la rendre plus conforme à la raison. Trois objectifs sont visés par l'institution.

En premier lieu, obtenir ce qui avait été rendu possible en Italie, c'est-à-dire imposer la dignité de l'art de peindre ou de sculpter et l'élever au rang des arts libéraux. Cette valorisation devait s'accompagner du refus de se compromettre dans l'industrie et le commerce de l'art (l'artisan ayant le droit de tenir boutique), de la radicalisation des antinomies – la main opposée à l'esprit, le pinceau ou le ciseau au crayon, la matière à la forme, l'accidentel au substantiel, le cœur à la raison, la beauté à la grâce, etc. – et de la distinction de disciplines comme la perspective, l'anatomie (enseignée par un chirurgien) ou l'histoire, susceptibles de détacher la pratique artistique des arts mécaniques.

En second lieu, élaborer une représentation convenable du pouvoir en soumettant l'art à une orthodoxie. Colbert s'octroie un droit de contrôle sur la mise en forme de la doctrine. Le dessein de l'art devra coïncider avec le destin du monarque et aura pour fin de distinguer en servant, d'ennoblir en glorifiant. Le « grand goût », le « beau choix », le « noble objet » sont autant d'instruments de sélection pour imposer la hiérarchie des genres. Un certain nombre d'ouvrages théoriques viennent étayer cette orientation en s'appuyant sur les leçons d'Alberti ou de Vasari, par exemple De l'origine de la peinture et des plus excellents peintres de l'Antiquité d'André Félibien, en 1660, qui met en évidence les relations entre les trois parties de la peinture (composition, dessin, couleur), ou Idée de la perfection de la peinture de Roland Fréart de Chambray, en 1662, qui insiste sur le rôle majeur de l'antique dans la recherche de la beauté.

Enfin, la théorie et l'orthodoxie contrôlées par le pouvoir – en l'occurrence par Le Brun, nommé chancelier à vie et recteur principal de l'Académie – ne peuvent qu'être renforcées par la décision, en 1663, de faire de l'enseignement un monopole, et par la fondation, en 1666, de l'Académie de France à Rome, où les meilleurs élèves pourront bénéficier de plusieurs années d'études.

Dans le cadre des « Conférences et solennités de l'Académie », les méthodes pédagogiques sont clairement définies ; elles passent par l'exemple (un des tableaux du cabinet du roi doit être commenté par un professeur) et par le précepte. L'imitation de la nature est médiatisée par une série de modèles hérités – il faut noter le rôle des collections de dessins qui commencent à se constituer et l'importance de la gravure comme instrument de diffusion – et de modèles désignés et commentés, avec ordre d'en tirer des préceptes positifs, pour les réinsérer dans[...]

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