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ENSEIGNEMENT DE L'ART

L'enseignement des « beaux-arts »

Garantes de la définition dominante de l'art, l'Académie royale de peinture et de sculpture (devenue l'Académie des beaux-arts en 1816), l'Académie de France à Rome et l'École de dessin appelée par la suite des beaux-arts de Paris ont subi, à chaque rupture historique, les attaques les plus violentes. La Convention les supprime ; le Directoire les rétablit ; Napoléon les transforme. Sous la Commune, les Fédérations artistiques décident de ne plus voter les budgets de ces trois institutions et prônent la gratuité de l'enseignement à tous les degrés, afin de « relever le niveau artistique par l'application de deux principes qui se complètent : liberté et responsabilité ». Courbet, initiateur de cette démocratisation, est mis en prison, puis exilé. Enfin, les événements de mai 1968 ébranlent les fondements de l'institution, en suscitant l'ouverture d'un « atelier populaire », lieu de création d'affiches politiques, tirées par des artistes militants. Mais après quelque deux siècles de coups de boutoir, seul le prix de Rome n'a pas conservé son autorité spécifique, bien que le titre de pensionnaire de l'Académie de France soit maintenu.

On peut se demander à quoi tient la stabilité de ces institutions. Comme l'analyse des procédures en matière de domination artistique l'a fait apparaître pour le xviie siècle, le renforcement et la centralisation de plus en plus affirmés des pouvoirs se sont accompagnés de luttes pour la légitimité culturelle, puis traduits par le monopole de l'enseignement et de la consécration. Paris – lieu géométrique du pouvoir – a fondé son autorité dans le champ artistique, en matérialisant le système des relations entre les différents pôles de la légitimation par une répartition spatiale : c'est l'Institut – à la place de l'Académie dissoute – qui est chargé d'organiser la Quatrième Classe, à partir de 1803 ; celle-ci doit s'occuper de la formation et des concours du prix de Rome ; c'est l'École des beaux-arts qui s'en remet aux membres de l'Institut pour tout ce qui relève de l'enseignement et de la pédagogie. Elle organise les expositions rétrospectives des artistes les plus éminents (Ingres et Bouguereau sont, en quelque sorte, des modèles de trajectoire officielle). Sur l'autre rive de la Seine, le Louvre offre à l'observation des élèves l'exemple de ses chefs-d'œuvre – les copies de peintures font partie de la formation obligée – et reçoit les Salons annuels. Enfin, le centre économique constitué par le secteur marchand va progressivement se développer à partir de ces lieux de production d'art. Chacune de ces instances concourt à la prospérité des autres et la remise en question de l'une d'entre elles ne peut que faire apparaître l'interdépendance de toutes ces institutions et leur complicité. On pouvait estimer que la révolution des esprits, conjuguée à la révolution industrielle, fournirait l'occasion de repenser le processus de la création artistique, en rapprochant, par exemple, l'art et la technique, dans la perspective d'une réconciliation de la pratique et de la théorie, de l'exécution et de la conception, ou en favorisant une ouverture vers le champ des connaissances. Or Napoléon ne laisse aucun doute sur sa volonté de maintenir ces univers séparés. L'École polytechnique, créée en 1794 pour préparer les futurs cadres scientifiques et techniques des grands corps de l'État, reste à l'écart de l'École des beaux-arts, même dans le domaine de l'architecture où la collaboration avec les ingénieurs s'avère nécessaire. La finalité des Beaux-Arts demeure donc la définition de la beauté, telle qu'elle a été initialement élaborée à Rome – et reprise par[...]

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