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ENTREPRISE Les relations interentreprises

Les entreprises fabriquent rarement l'intégralité de leurs produits intra-muros. Leurs moyens sont trop limités pour qu'elles puissent élaborer seules tous les éléments qui composent leurs produits ; elles recourent donc au marché et à des accords qui obéissent à des procédures distinctes des opérations banales d'achat-vente pratiquées par les particuliers. La différence vient de ce que, pour prouver son utilité, l'entreprise est tenue d'ajouter de la valeur aux produits acquis en amont. Les comptes d'exploitation mettent en lumière cet état de mutuelle dépendance. Ainsi, les consommations intermédiaires atteignent en moyenne la moitié du chiffre d'affaires des entreprises, voire plus dans celles qui se bornent à concevoir le produit final et à en assembler les composants commandés à d'autres firmes. Réciproquement, nombre d'entreprises appartenant aux industries de biens intermédiaires et de biens d'équipement destinent la totalité de leurs ventes à leurs consœurs, à bonne distance du consommateur final.

Par ailleurs, les bilans de sociétés enregistrent souvent, sous la rubrique des « autres valeurs immobilisées », les participations détenues dans le capital d'autres firmes. La répartition des droits de propriété dessine le contour des groupes de sociétés et le degré de contrôle ou d'influence que la société mère exerce sur ses filiales.

La théorie économique accorde pourtant encore peu d'importance à ces phénomènes et met principalement l'accent sur un seul type de relations interentreprises : une concurrence entendue en un sens particulier, à travers la fiction des marchés parfaits, où les offreurs ne profiteraient d'aucun pouvoir de marché. Mais, même la conception de l'entreprise détentrice d'un pouvoir de marché reste rudimentaire, car elle réduit la concurrence à une simple affaire de fixation des prix et de partage des marchés de biens de consommation. Elle laisse de côté l'ensemble des relations interentreprises qu'il est possible de classer en plusieurs catégories. Tout d'abord, l'entreprise entretient, du fait même de sa constitution, des liens vitaux avec ses partenaires proches – apporteurs de capitaux et intermédiaires financiers, distributeurs. En deuxième lieu, ses produits rivalisent avec ceux de la concurrence sur les marchés où elle est présente. Elle s'adresse, en outre, à des fournisseurs pour acheter les produits intermédiaires qu'elle transforme et assemble avant de les livrer aux entreprises situées en aval, jusqu'au stade ultime de la vente au consommateur. De plus, toute entreprise peut devenir à un moment de son existence le promoteur ou la cible d'une opération de fusions-acquisitions qui la conduit à concentrer ses activités avec celles d'une firme partenaire. Enfin, partant du constat qu'une entreprise isolée ne peut tout faire toute seule, ni se procurer par des achats sur le marché les fournitures nécessaires, l'entreprise peut préférer établir des accords centrés sur l'exploitation d'intérêts communs : centrales d'achat, groupements d'entreprises sur les places de marché d'Internet, accords de coopération, de sous-traitance et de coproduction, cartels d'entente visant à restreindre la concurrence. Ce type d'alliances circonscrites à un objet précis préserve l'autonomie des partenaires, tout en facilitant leur collaboration.

Ces modes de relations influencent diversement le progrès économique. La plupart le stimulent en améliorant l'organisation des activités et en renforçant la concurrence. D'autres risquent de porter préjudice au bon fonctionnement des marchés et de la concurrence (pratiques monopolistiques abusives, ententes clandestines) et doivent être surveillés et sanctionnés. La concurrence désigne ici un processus[...]

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  • : professeur émérite d'économie à l'université de Paris-IX-Dauphine

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