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ENTREPRISE Théories et représentations

Les théories cognitives de la firme

Fortement influencées par le modèle néo-classique, les théories contractuelles en sont parfois considérées comme de simples extensions. Les justifications de la firme trouvent leur origine dans le souci de s'écarter le moins possible de l'optimum néo-classique, de ne pas perdre de valeur du fait des coûts de transaction ou d'agence, de l'imperfection des droits de propriété, mal délimités, insuffisamment protégés ou difficilement transférables. La firme évolue en adaptant son architecture et ses frontières ; elle réagit à des modifications de l'environnement, passant d'un équilibre à un autre pour préserver son efficience. Cependant, les processus d'ajustement sont ignorés et la notion d'efficience dynamique, qui tient compte des coûts d'ajustement, est écartée.

Contrairement aux théories contractuelles, les théories cognitives représentent une rupture radicale avec le modèle néo-classique. Elles rejettent, en particulier, l'hypothèse de rationalité calculatoire – les décisions se prennent en fonction d'un calcul fondé sur une comparaison des conséquences –, limitée ou non, au profit de celle de rationalité procédurale. Ainsi, la rationalité s'apprécie en fonction non plus des conséquences des décisions mais des processus selon lesquels elles sont prises. Dans ces théories, la création de valeur dépend en priorité de l'identité et des compétences de la firme. La spécificité de cette dernière est liée à sa capacité de créer de la connaissance et, ainsi, d'être rentable de façon durable. L'argument cognitif est utilisé de différentes façons, soit comme moyen de faciliter la coordination et de réduire les coûts des conflits – lesquels ne sont pas uniquement des conflits d'intérêts mais ont également un caractère cognitif, en raison de la diversité des modèles cognitifs des parties prenantes –, soit comme mode d'invention de nouvelles opportunités productives.

Les théories cognitives comprennent trois principaux courants : la théorie comportementale de la firme, la théorie évolutionniste et les théories stratégiques.

La théorie comportementale

La théorie comportementale fait de la firme une coalition politique et une institution cognitive adaptative. Ce courant trouve son origine principalement dans les travaux de Herbert Simon (1947), James March et Herbert Simon (1958) et Richard Cyert et James March (1963). La firme y est vue comme une coalition politique et une institution cognitive adaptative : elle oriente l'attention des acteurs pour définir à la fois les problèmes à résoudre et les solutions à leur apporter. Contrairement aux théories contractuelles, l'étude des processus décisionnels est privilégiée. Dans cette perspective, il s'agit, en particulier, d'expliquer l'émergence des objectifs de la firme, de façon endogène, comme le résultat d'une négociation entre les différentes composantes de la firme vue comme une coalition d'individus ou de groupes, dont il faut assurer la stabilité.

La théorie comportementale retient également une vision originale du comportement de la firme qui ne se contente pas de réagir aux évolutions de l'environnement mais s'adapte activement via l'apprentissage. À court terme, le comportement adaptatif de la firme est déterminé par un ensemble de règles procédurales – des routines, permettant de résoudre des problèmes. Ces routines constituent une mémoire organisationnelle et sont le support de la connaissance spécifique stockée par la firme. Le passage du comportement à court terme, assis sur les routines, à celui de long terme se fait grâce à l'apprentissage organisationnel, processus guidé par la résolution des problèmes. La recherche d'une solution qui est orientée en fonction de l'histoire de la firme et des solutions précédentes ne[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite en sciences de gestion à l'université de Bourgogne

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