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ENVIRONNEMENT, art

Environnement, le mot est à la mode et, dans le domaine de l'art, recouvre des significations bien différentes.

Si on le trouve plutôt dans le langage des peintres, des sculpteurs et des architectes, il semble bien que ni les uns ni les autres n'aient en vue la même notion. Ce n'est donc pas une définition qu'il faut en apporter, mais plusieurs : selon les métiers et selon les écoles.

Le sens traditionnel du mot est lui-même ambigu : les dictionnaires en signalent le caractère actif (environner, c'est mettre autour : par exemple, environner de murs un jardin) ou passif (être autour : les montagnes qui environnent la ville). Dans le vocabulaire artistique contemporain, il semble bien qu'environnement ait gardé cette signification, marquant, très grossièrement, une distinction entre sculpteurs et architectes : pour les premiers, il s'agira de créer un environnement, c'est-à-dire un espace ayant une signification plastique ; quant aux architectes ils devront se rendre sensible à l'environnement, autrement dit tenir compte du contexte urbain et social, et l'étudier. C'est là une distinction fondamentale dans l'emploi de ce terme – une autre distinction étant celle qui, à partir de l'intérêt pour les questions environnementales, amène à poser la question d'un art écologique.

Créer un environnement

« [Ils] se sont livrés là à ce que les Américains appellent le jeu des environnements. Mais cela va beaucoup plus loin que ce jeu puisqu'il s'agit d'une tentative très poussée d'intégration des arts. La sculpture, la peinture et l'architecture, là, ne font qu'un. » Ces phrases d'introduction de Michel Ragon pour l'exposition Studio meublé, place Vendôme à la galerie Lacloche, manifestation annexe de la IVe biennale de Paris (1965), sont révélatrices d'une seconde ambiguïté du terme dans le vocabulaire propre aux sculpteurs : pour les uns, l'environnement est un « jeu » ; pour les autres, c'est une « tentative très poussée d'intégration des arts ». Michel Ragon est d'ailleurs le premier, en France, à utiliser le terme « environnement » ; il en rappelle l'origine et la signification américaine : c'est que l'expression, à cette date, ne s'est pas encore acclimatée en Europe.

Rendre le réel à l'état brut

Environnement, en effet, est emprunté au vocabulaire du «  pop art » : le jeu de l'environnement consiste à réunir des objets d'usage courant, voire des déchets, dont la simple agglomération constitue l'œuvre d'art. En 1959, le pop art était encore un phénomène typiquement américain, étroitement relié à ses antécédents dadaïstes – notamment Duchamp, et Schwitters avec ses Merzbau. En 1960, lors de l'exposition Documenta de Cassel en Allemagne, les organisateurs ne pensent encore qu'à présenter « le bilan de dix ans de recherches non figuratives ». En 1961, le mouvement atteint toute l'Europe : Robert Rauschenberg expose à Paris The Pilgrim, une chaise collée sur une toile. « La société industrielle des États-Unis, pour la première fois, se trouvait magistralement éclairée, comme sur une scène où les objets-symboles de l'American way of life, la morale de l'optimisme et du sourire obligatoire prenaient tout à coup pour les yeux de l'amateur d'art leur signification tragique » (Alain Jouffroy). Jusqu'en 1964, la critique européenne est restée très réticente à l'égard de cette tendance : il faut attendre la XXXIIe biennale de Venise, décernant une récompense à Rauschenberg, pour vaincre la résistance obstinée des critiques, attachés à l'art abstrait.

Cette réticence s'explique en outre par l'attitude toute différente des artistes européens face à ces problèmes. En Europe, on ne joue[...]

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Écrit par

  • : conservateur général du Patrimoine, vice-président de la Commission du vieux Paris
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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