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ENVIRONNEMENT, art

Être sensible à l'environnement

Le sens passif du terme est, grosso modo, celui que perçoivent les architectes : ils n'estiment pas « réaliser un environnement » lorsqu'ils construisent un édifice, ce qui relève à leur sens de l'architecture ou de l'urbanisme ; mais, par contre, ils se montrent aujourd'hui très préoccupés par l'environnement de leurs bâtiments, c'est-à-dire par tout ce qu'il y a autour, éléments préexistants, voire contraignants.

L'origine de ce sens architectural est indubitablement anglo-saxonne, le terme n'ayant d'ailleurs en anglais qu'une signification très générale. En français, il ne devient courant avec le même sens que dans les années 1966-1967, notamment dans la « plate-forme revendicative » des élèves de l'École des beaux-arts de Paris, qui réclament une faculté de l'environnement, pour remplacer les écoles d'architecture. Une expérience est tentée dans ce sens en 1967-1968. Elle aboutit à la constitution d'Environnement 68 et même à la fondation d'un Institut d'étude de l'environnement après les événements de mai 1968, en France, et la fermeture de l'école.

Environnement est ici un mot politique qui permet d'éviter celui d'architecture– ou pire de beaux-arts – dont le sens paraît à beaucoup extrêmement dépréciatif.

Il faut souligner combien cette notion, quoiqu'un peu imprécise, va s'avérer essentielle dans le domaine de l'urbanisme ; l'environnement, désormais, n'est plus seulement le contexte visuel ou topographique d'un bâtiment : on parle alors des « sciences de l'environnement » et on désigne par cette locution la sociologie, la géographie humaine, l'économie et même l'histoire de l'art, soit toutes les sciences humaines ayant un rapport quelconque avec l'acte de bâtir.

Dans les années qui suivirent la Seconde Guerre mondiale, sous l'influence des écrits de Le Corbusier, s'était développée une théorie fonctionnaliste de l'architecture et de l'urbanisme qui réduisait les problèmes à une échelle très élémentaire et quelque peu mécaniste : la cellule d'habitation, mesurée sur les gestes de l'homme, l'architecture, qui était seulement l'expression honnête de cette cellule, et l'urbanisme, dont l'intention se limitait à une équation air + soleil + verdure = bonheur, liée à une théorie fallacieuse des trois établissements humains et du classement des circulations, constituaient un ensemble cohérent mais stérile.

Après quelques expériences désastreuses d'« habitat pour le plus grand nombre », on s'est orienté vers un modernisme décoratif qui, tout en acceptant les principes systématiques du rationalisme, rachetait son « ennui » par une ornementation plaquée que l'abondance des matériaux lui facilitait. Mais cette solution pitoyable ne pouvait donner lieu qu'à une vive réaction contre ce que l'on a appelé la « renaissance du style Beaux-Arts », et cette réaction s'est exprimée par un souci très vif de l'environnement.

Les premières tentatives avaient été celles d'architectes comme Frank Lloyd Wright et Eero Saarinen aux États-Unis, Alvar Aalto en Finlande, Hans Scharoun en Allemagne, qui brisaient l'idéal puriste de l'architecture moderne. Le Corbusier lui-même, dans ses dernières recherches, avait exprimé cette nécessité. Mais, bientôt, après la recherche de l'intégration au site et la recherche de formes souples, on s'est intéressé à ce qui constituait réellement une atmosphère urbaine : le tissu de relations sociales, économiques, géographiques, politiques et culturelles qui donnait naissance à une ville dans et à travers l'histoire.

Il faut ainsi remarquer le succès[...]

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Écrit par

  • : conservateur général du Patrimoine, vice-président de la Commission du vieux Paris
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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