ÉQUATIONS ALGÉBRIQUES
La résolution algébrique des équations
Par cette expression, on entend traditionnellement la résolution des équations au moyen de radicaux carrés, cubiques, etc.
On a vu que sont résolubles par ce procédé les équations de degrés 2, 3 et 4. Après les succès de l'école italienne au xvie siècle, les mathématiciens se sont attachés à trouver des formules de résolution analogues pour les degrés suivants, singulièrement pour le cinquième. Parmi les recherches les plus remarquables en ce domaine, on peut citer celles de Tschirnhaus (1651-1708). Il s'efforce, en 1689, par un changement de variable, de ramener toute équation algébrique à une équation binôme. Plus précisément, soit P(x) = 0 une équation de degré n. Posons y = Q(x), Q étant un polynôme de degré n − 1 à coefficients indéterminés. On élimine x entre les deux équations P(x) = 0 et Q(x) − y = 0, et l'on détermine les coefficients du second polynôme de façon à faire disparaître, dans l'équation résultante en y, certains ou tous les termes intermédiaires. Si la méthode de Tschirnhaus réussissait toujours, toute équation serait algébriquement résoluble. Au xviiie siècle, Euler et Bezout ont étudié le même problème par des procédés analogues.
Un mémoire de Vandermonde, lu en novembre 1770, devait inaugurer une ère nouvelle. Kronecker n'a pas craint d'affirmer que l'essor moderne de l'algèbre commençait avec ce mémoire. Vandermonde y apparaît comme le précurseur et le premier ouvrier de la théorie des substitutions, distinguant, avant Gauss et Abel, les fonctions cycliques invariantes par une permutation circulaire déterminée et décomposant les fonctions symétriques en fonctions cycliques. Naturellement, il n'aboutit pas pour les degrés 5 et 6, mais il montre combien il serait prématuré de conclure à l'impossibilité de la résolution des équations générales de degré supérieur à 4. Puis il note que, si sa méthode échoue pour ces équations générales, elle réussit pour des équations particulières dont les racines sont liées par certaines relations et il prend pour exemple x11 − 1 = 0, dont il exprime les solutions au moyen de racines carrées et de racines cinquièmes.
Avec Vandermonde apparaît ainsi la notion de substitution dans un ensemble fini, celui des racines d'une équation algébrique, notion que devaient approfondir les algébristes ultérieurs, et dont l'étude aboutira, avec Galois, au concept nouveau de groupe fini.
Les idées développées par Vandermonde se trouvent encore, indépendamment d'ailleurs, dans l'important mémoire de Joseph Lagrange, lu en 1771 : Réflexions sur la résolution algébrique des équations.
Gauss, dans ses Disquisitiones arithmeticae (1801), explicite les remarques de Vandermonde sur les équations binômes xn − 1 = 0, les appuie solidement sur les propriétés arithmétiques de l'exposant et montre notamment, à partir de l'équation x17 − 1 = 0, la possibilité d'inscrire dans le cercle, à la règle et au compas, un polygone régulier de 17 côtés.
Les travaux de Vandermonde, Lagrange et Gauss attirèrent en particulier l'attention des géomètres sur les fonctions entières de plusieurs variables et sur les changements qu'elles éprouvent dans une permutation de ces variables. Lagrange démontra que le nombre des valeurs d'une fonction de n lettres est toujours un diviseur de n !, produit des n premiers entiers. Ruffini (1765-1822) établit en 1799 que si une fonction de cinq variables a moins de cinq valeurs distinctes, elle ne peut en avoir plus de deux. Si ce théorème n'établit pas l'impossibilité de la résolution algébrique de l'équation générale du cinquième degré, il prouve du moins l'impossibilité de former une équation auxiliaire ou résolvante de degré inférieur à 5. Cauchy généralise[...]
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Écrit par
- Jean ITARD : agrégé de l'Université, membre correspondant de l'Académie internationale d'histoire des sciences
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