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ERIC CARL ERICSON dit (1891-1958)

Fils d'un marchand de whisky de l'Illinois, Carl Ericson s'est formé aux disciplines artistiques à l'École d'art de Chicago. Ses premiers dessins, assez conventionnels, sont influencés par l'enseignement académique ; ces illustrations au style clair et efficace répondent aux désirs des chefs d'entreprise de l'époque qui commandent affiches et documents publicitaires. Au bout de douze années il rompt avec cette carrière et s'établit à New York (1914).

Ses aquarelles séduisent l'équipe de Vogue, et à partir de 1916 commence une longue collaboration entre l'artiste et le magazine. Dans un premier temps c'est sa femme, Lee Creelman Ericson, qui, en tant qu'illustratrice de mode, enregistre le plus de succès. Ses silhouettes longilignes font merveille lorsqu'il s'agit d'illustrer les robes tubulaires des années vingt. Le couple vit quelques années à Paris et bénéficie de commandes pour Vogue, La Gazette du bon ton...

Les activités d'Eric pour Vogue américain s'intensifient à partir de 1927 ; il deviendra peu à peu le meilleur artiste de l'équipe américaine de Vogue, tandis que l'équipe française compte des artistes comme Pagès, Bouët-Willaumez. Les illustrations d'Eric pour Vogue, auxquelles la couleur (introduite en 1929) ajoute une grande séduction, acquièrent une liberté, une maîtrise indéniable : inspiré par Von Dongen, par Matisse, il développe un style elliptique et néanmoins explicite, sachant privilégier sans hésitation les détails ou les accessoires qui font le chic d'un modèle.

Observateur aigu de ses contemporains, Eric donne non seulement des vignettes de mode, mais aussi des compositions amusantes ayant pour thèmes les circonstances de la vie mondaine : dîner dans un grand hôtel, réunion hippique... Il y évoque, d'un crayon alerte, les silhouettes des mondains, des viveurs, des grandes dames blasées, aux physionomies expressives et très typées, et les scènes qu'il retrace restituent le tohu-bohu et l'animation des réunions de la haute société, sans négliger le message de mode qui les justifient, comme telle scène hippique accompagnée du commentaire « Chevaux fringants, vestes rouges, prairies vallonnées. Tout ce qui ne serait pas du tweed superbe serait absolument déplacé dans cette campagne américaine. »

Séjournant essentiellement à Paris jusqu'en 1939, il y perfectionne son style. Bientôt en situation de concurrence avec Bouët-Willaumez, il se distingue par son talent incisif et adopte l'humour désinvolte et les tenues du parfait dandy, qui font de lui un personnage très fêté. Dessinant ordinairement debout, sur un bloc de papier posé sur un chevalet, Eric développe un style brillant, accrocheur et très graphique, qui souligne ce que l'élégance a d'intense, de fragile. Cette sophistication exemplaire influencera, avant et après la guerre, toute une génération d'illustrateurs.

Fuyant l'invasion de la France par les Allemands, Eric se réfugie à Bordeaux puis se rend à New York où il poursuit avec succès ses activités pour Vogue.

Ses habitudes de bon vivant, son goût pour la fête et la bohème ayant altéré grandement sa santé, ses travaux pour Vogue deviennent plus rares, alors même que son style fait école. Il donne encore pour Vogue des illustrations au trait elliptique, comme telle silhouette féminine, esquissée en superposition au dessin d'un champ de courses, qui, d'une main, retient son chapeau, ou telle jeune femme en jupe écossaise de Schiaparelli (1948). À cette époque son coup de crayon accuse les contrastes, souligne les contours et les angles. Il a institué l'habitude d'introduire dans les illustrations de mode un embryon de scène de séduction : une femme idéale, épanouie, admirativement contemplée par une ou plusieurs silhouettes masculines légèrement tracées ;[...]

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Écrit par

  • : conservateur du musée de la Mode et du Costume, palais Galliera

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