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ERIDU

Tell Abu Shahrein, l'ancienne Eridu, se trouve à quelque 15 kilomètres au sud de la célèbre cité d'Ur, en Mésopotamie méridionale. Le site fut surtout exploré de 1947 à 1949 par le Service des antiquités iraquien (F. Safar, M. A. Mustapha et S. Lloyd, Eridu, Bagdad, 1981).

Dans le chantier principal, un sondage a traversé dix-neuf niveaux archéologiques superposés. Les plus anciens (XIX-VI), couvrant une période comprise entre le début du VIe millénaire et la fin du Ve, appartiennent à la culture préhistorique d'Obeid, marquée par l'élargissement progressif des communautés villageoises et par leur transformation en chefferies.

Le matériel recueilli comprend surtout une belle céramique peinte en brun-noir sur fond clair dont les formes et les décors ont évolué. L'analyse de cette transformation permit de distinguer quatre phases chronologiques (J. Oates, « Ur and Eridu, the Prehistory », in Iraq, xxii, 1960), et la séquence ainsi définie sert encore de référence.

Les niveaux profonds du sondage d'Eridu, dégagés sur une superficie restreinte, n'ont livré que quelques vestiges architecturaux. En revanche, les niveaux XI-VI abritaient les vestiges en brique crue de six constructions exceptionnelles, de plan tripartite, successivement élevées au même emplacement sur une terrasse. Ces édifices, qui ont longtemps été interprétés comme des temples, sont plus probablement des lieux de pouvoir où se réunissaient les notables de la communauté. Avec le temps, les terrasses deviennent plus hautes, les édifices plus grands (de 130 à 280 m2), leur plan plus régulier, le décor des façades plus soigné, avec une alternance de saillants et de rentrants qui font jouer l'ombre et la lumière.

À quelque distance du sondage en profondeur, les fouilleurs ont découvert un cimetière de la fin de l'époque d'Obeid, dont près de deux cents tombes ont été explorées (contrairement à la pratique courante en Mésopotamie de déposer les corps sur le flanc, en position fléchie, ici les morts avaient été allongés sur le dos, les mains sur la poitrine). La plupart des défunts étaient placés dans un coffre en brique, assez coûteux, mais le mobilier funéraire restait assez pauvre : éléments de parure et récipients en céramique. Des tombes plus riches qui révéleraient l'ampleur de la hiérarchie sociale seront peut-être découvertes.

L'époque suivante, dite d'Uruk (~ IVe millénaire), qui voit l'apparition des premières cités, est également bien attestée sur le site, mais les niveaux correspondants ont été peu explorés. Des bâtiments officiels il ne reste que d'imposantes terrasses, les constructions proprement dites ayant été emportées par l'érosion. On a découvert à proximité un petit édifice (une habitation semble-t-il) étonnamment bien conservé, avec des murs atteignant près de 2 mètres de hauteur.

La culture sumérienne de la première moitié du ~ IIIe millénaire est attestée, dans un autre chantier du site, par un « palais » dont la seule partie dégagée atteint déjà quelque 2 400 mètres carrés. La tour à étages (ziggourat) dont les ruines dominent encore le site est un peu plus récente (IIIe dynastie d'Ur, fin du ~ IIIe millénaire), et l'histoire de la cité s'est sans doute prolongée bien davantage (si l'on en juge par les nombreuses mentions qu'en font les textes qui évoquent souvent le célèbre sanctuaire du dieu Enki-Éa qui y était bâti), mais nous ne connaissons presque rien des vestiges des ~ IIe et ~ Ier millénaires.

— Jean-Daniel FOREST

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