Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

OLMI ERMANNO (1931-2018)

Le cinéaste Ermanno Olmi est né à Bergame (Lombardie) le 24 juillet 1931. Après une longue activité de documentariste pour la société Edisonvolta, où, à travers des commandes industrielles, il met au point une approche de l'homme d'une grande sensibilité, il passe au film de fiction avec des œuvres très proches de ses expériences antérieures. Il tempo si è fermato, son premier film (1959), met en scène un vieil ouvrier et un étudiant qui passent l'hiver dans un refuge près d'un barrage en construction. Plus élaboré, Il posto (1961), son deuxième film, évoque la découverte traumatisante du monde de l'entreprise par un jeune homme à la recherche d'un premier emploi. Observation quasi clinique d'un individu qui accepte sans rechigner une intégration le condamnant à une vie de gratte-papier, Il Posto est la dénonciation feutrée d'un système économique qui transforme les illusions de jeunesse en acceptation passive d'un travail stérilisant l'âme et le corps. Olmi balance entre l'univers absurde de Kafka et le désespoir métaphysique de Beckett, étrangement mêlés à la patience chrétienne de celui qui accepte son sort sans idée de révolte.

Dans une perspective spiritualiste, Olmi poursuit en marge du cinéma spectacle traditionnel une œuvre exigeante en partie tournée grâce à l'aide de la télévision. Les Fiancés (1963), Un certain jour (1968), L'Or dans la montagne (1969), Pendant l'été (1971), La Circonstance (1974) marquent les étapes d'une filmographie où l'observation de l'homme prend des allures d'ascèse. L'attention du grand public se porte sur lui en 1978 avec L'Arbre aux sabots, qui obtient la palme d'or au festival de Cannes. Tourné en dialecte bergamasque, au risque de nuire à l'exploitation commerciale du film, L'Arbre aux sabots circule en Italie dans la version originale ainsi que dans une version doublée en italien par les paysans qui ont interprété le film. Le thème est simple : à la fin du xixe siècle, quatre familles de métayers vivent dans un domaine de la région au sud de Bergame. Ils partagent les bons et les mauvais moments de la vie quotidienne. Ils sont liés par la résistance qu'ils tentent d'établir face au patron de la ferme qui exerce très sévèrement son pouvoir : « Le film, note Olmi, s'est organisé spontanément autour de la vie de la ferme : le travail, les bêtes, les saisons, les rites ; les patrons qui possèdent les bâtiments, les terres, le bétail et une partie des instruments agraires ; les métayers qui, eux, n'ont que leur travail (plus ils ont d'enfants, plus ils ont de “bras” pour les champs, mais aussi de bouches à nourrir) ; les veillées dans l'étable en écoutant les histoires, les saveurs et les odeurs de ce monde... J'ai considéré cette matière première avec le respect affectueux d'un témoin. Le secret du film réside dans le fait que rien n'a été préétabli, décidé à froid, ni dans la conception, ni dans la réalisation. Je n'ai rien inventé, je n'ai pas voulu jouer les poètes ou les idéologues. Je me suis surtout souvenu de mes origines paysannes, je suis retourné chez ces paysans qui m'ont vu naître et il m'a suffi d'entonner le refrain pour que tout le monde reprenne en chœur, spontanément. » (in Aldo Tassone, Le Cinéma italien parle, Paris, 1982). Loin d'une démarche ethnographique, Olmi fait vivre ses paysans comme s'il filmait la contemporanéité de l'existence, celle d'hier comme celle d'aujourd'hui ; son film n'est en rien un film en costumes et à peine un film historique tant ce qu'il scrute relève d'un regard sur l'homme non dans ce qui a changé depuis la fin du xixe siècle mais dans ce qui demeure vivant aujourd'hui.

<it>La Légende du saint buveur</it>, E. Olmi - crédits : Bac Films/ courtesy Everett Collection/ Aurimages

La Légende du saint buveur, E. Olmi

Olmi poursuit[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur émérite, université professeur émérite, université Paris I-Panthéon Sorbonne

Classification

Média

<it>La Légende du saint buveur</it>, E. Olmi - crédits : Bac Films/ courtesy Everett Collection/ Aurimages

La Légende du saint buveur, E. Olmi