LASÈGUE ERNEST CHARLES (1816-1883)
Psychiatre et médecin français. Après avoir étudié la philosophie, qu'il enseigna comme professeur suppléant au lycée Louis-le-Grand à Paris, Lasègue commença ses études de médecine avec Claude Bernard et B. Morel, puis de psychiatrie à la Salpêtrière (en particulier avec J.-P. Falret). Devenu médecin des hôpitaux de Paris en 1854 et chargé d'un cours de clinique des maladies mentales en 1862, il est finalement nommé professeur de clinique médicale à la Pitié et partage avec Legrand du Saule la consultation de la préfecture de police (la future infirmerie spéciale du Dépôt).
Après un premier travail (avec Morel) sur l'« Origine de l'école psychique allemande », il se montre, dans sa thèse de médecine, encore très marqué par sa formation philosophique et traite de la « doctrine médicale de Stahl » et du « traitement moral ». Mais il se pose déjà la question de la possibilité d'un tel traitement et met en doute la valeur des théories philosophiques et spiritualistes en médecine. Opposé à tout système, il se refuse alors à utiliser ses connaissances en philosophie, si ce n'est pour dénoncer le peu de cohérence logique des différentes théories médicales, et consacre ses travaux à une observation purement clinique, minutieuse et approfondie, à la fois dans le domaine de la pathologie mentale et dans celui de la médecine interne (notamment sur les signes de la névralgie sciatique). En pathologie mentale, il décrit le délire de persécution avec ses différentes phases évolutives, la paralysie générale progressive, la folie à deux, le délire alcoolique et surtout les différentes manifestations psychiatriques de l'hystérie : l'anorexie, la perversité, les mensonges hystériques.
À la consultation du Dépôt, Lasègue est amené à étudier certains problèmes de médecine légale, en particulier celui de la « responsabilité des aliénés ». Examinant de nombreux délirants alcooliques, il peut montrer que ce délire alcoolique n'est pas de même nature que la psychose délirante chronique. Pour lui, « ce n'est pas un délire mais un rêve », c'est-à-dire un trouble de la régulation du sommeil et de la vigilance. Il critique ainsi l'analogie entre psychose d'origine toxique et psychose chronique, analogie que Moreau de Tours a utilisée abusivement pour défendre une causalité organodynamique en pathologie mentale.
L'œuvre de Lasègue (Études médicales, 2 vol., 1884 ; Écrits psychiatriques, 1971) ramène donc constamment le psychiatre à la rigueur de l'observation clinique et au refus de toute facilité dogmatique, qu'elle aille dans le sens de la psychogenèse ou dans celui de l'organogenèse.
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Écrit par
- Jacques POSTEL : médecin-chef au centre hospitalier Sainte-Anne, Paris
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