BASILE ERNESTO (1857-1932)
Né à Palerme, fils d'un architecte célèbre en tant qu'homme politique et constructeur du théâtre Massimo (1878), Ernesto Basile dispose très tôt de nombreuses facilités. Ayant succédé à son père comme professeur à l'Académie royale des Beaux-Arts de Palerme, il en deviendra le directeur à quarante ans. Au moment de l'Exposition internationale d'Art décoratif moderne de Turin en 1902, c'est déjà un maître confirmé qui a édifié le palais de justice de Palerme (1882) dans le goût des palais-forteresses de Florence et participé au concours pour le monument à Victor-Emmanuel (1888-1911).
À Turin, il fait bande à part en présentant des meubles rigoureux qui auraient pu être signés par la firme autrichienne Thonet, productrice des célèbres chaises. Or, en même temps, il construit, dans sa ville natale, la villa Igiea – à l'origine un sanatorium transformé en hôtel, ce qu'il est toujours – où les traces du Floreale sont plus visibles dans la décoration que dans le parti architectural. Mais l'esprit de l'Art nouveau l'emporte, en 1899-1903, dans la villa Florio, aujourd'hui détruite. Ici, un plan massé s'accompagne de plusieurs emmarchements qui amènent à se demander si l'édifice possède une façade principale. Deux tours dominent la villa parée d'éléments décoratifs dont le caractère floral et oriental renoue avec les recherches baroques.
Attaché aux traditions normandes et mauresques de son île, Basile sentira cependant assez vite la nécessité d'un compromis : il saura se freiner dans la nouvelle chambre des députés de Rome (1908-1918), ville où l'Art nouveau n'était pas parvenu à s'introduire. Même à Palerme, Basile affirmera son retour au classicisme dans l'Institut provincial antituberculeux. À cette époque, la partie est bien perdue pour les anciens tenants du Floreale, y compris les repentis. En 1928, sur les lieux de leur triomphe à Turin, vingt-cinq ans plus tôt, se déroule la première exposition d'architecture « futuriste ». L'ornement est devenu un « crime », comme l'affirmait l'Autrichien Adolf Loos dès 1912. Pour plus d'un demi-siècle, la ligne droite va imposer sa rigueur sur toute l'Europe.
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Écrit par
- Roger-Henri GUERRAND : professeur émérite à l'École d'architecture de Paris-Belleville
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