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HAEFLIGER ERNST (1919-2007)

Avec un naturel dont il y a peu d'exemples, le Suisse Ernst Haefliger pouvait passer de l'Église à l'opéra et à la salle de concert sans rien perdre de cette grâce et de cette retenue dans l'expression qui ont fait de lui, dans son répertoire d'élection, l'un des plus parfaits ténors de sa génération.

Ernst Haefliger (souvent orthographié Häfliger dans les pays germaniques et anglo-saxons) naît à Davos, dans les Grisons (Suisse), le 6 juillet 1919. Il se destine tout d'abord à une carrière dans l'enseignement. C'est au séminaire de Wettingen, dans le canton d'Aargau, qu'il aborde le violon et le chant. Il travaille sa voix au Conservatoire de Zurich, puis à Vienne – avec Julius Patzak – et à Prague – avec Fernando Carpi. Il fait ses débuts à Zurich en 1942, comme Évangéliste de la Passion selon saint Jean de Jean-Sébastien Bach. Ernst Haefliger se fait très vite une spécialité de cet emploi qui exige à la fois sens dramatique et sobriété de style. Karl Richter et Eugen Jochum ne voudront pas d'autre narrateur pour la Passion selon saint Matthieu, dont les enregistrements ont, à des titres divers, marqué l'histoire du disque avant la redécouverte de l'esthétique baroque. Familier des cantates de Bach, sous la direction de Günther Ramin ou de Karl Richter, Ernst Haefliger y côtoie des musiciens accomplis comme Hermann Prey, Evelyn Lear, Agnes Giebel, Walter Berry ou Marga Höffgen. Du même compositeur, il nous laisse un enthousiasmant Magnificat où il est en compagnie de Maria Stader, Herta Töpper et Dietrich Fischer-Dieskau, avec le toujours fidèle Karl Richter.

Recruté par l'Opéra de Zurich (1943-1952), Ernst Haefliger commence à se faire un nom. Ses débuts au festival de Salzbourg, en 1949, lui offrent le modeste rôle du Premier Homme d'armes dans La Flûte enchantée – dirigée par Wilhelm Furtwängler –, prélude à l'une des plus brillantes carrières de mozartien qui soit, mais aussi celui de Tiresias lors de la création d'Antigonae de Carl Orff, sous la direction de Ferenc Fricsay. De 1952 à 1974, il appartient à la troupe de la Städtische Oper de Berlin (Deutsche Oper à partir de 1961), et y parcourt l'éventail complet des rôles de ténor lyrique : Don Ottavio (Don Giovanni), Ferrando (Così fan tutte de Mozart), Pelléas (Pelléas et Mélisande de Debussy), Jeník (La Fiancée vendue de Smetana), Froh (L'Or du Rhin de Wagner), Kalaf (Turandot de Busoni) et le rôle-titre de Palestrina de Hans Pfitzner, un des rôles favoris de son maître Patzak, et qui demeure une de ses plus grandes incarnations. Il devient l'un des solistes préférés de Ferenc Fricsay, qui le sollicite régulièrement pour ses enregistrements lyriques : Don Giovanni (Don Ottavio), La Flûte enchantée (Tamino), L'Enlèvement au sérail (Belmonte), Fidelio (Florestan, un rôle qu'il n'interprétera jamais sur scène), avec de prestigieuses distributions où l'on retrouve Dietrich Fischer-Dieskau, Sena Jurinac, Maria Stader, Irmgard Seefried, Lisa Otto, Rita Streich, Joseph Greindl... Le festival de Glyndebourne l'invite en 1956 pour incarner un Belmonte d'anthologie, qu'il reprend l'année suivante, où il chante aussi Tamino. Le festival de Salzbourg lui offre Idamante (Idomeneo de Mozart) sous la direction de Ferenc Fricsay en 1961 et de Peter Maag en 1962, aux côtés de Waldemar Kmentt (Idomeneo), Pilar Lorengar (Ilia) et Elisabeth Grümmer (Elettra).

La musique religieuse – de Haendel, Haydn, Rossini mais aussi de Bruckner, sans oublier un superbe Requiem de Dvǒrák dirigé par Karel Aňcerl – reste son univers naturel. Vaillance de l'attaque, pureté du legato et saveur du timbre, qui le placent parmi l'élite du chant de son époque, lui permettent de s'imposer tout autant dans le domaine symphonique. Wilhelm Furtwängler, Herbert von[...]

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