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KNOBIL ERNST (1926-2000)

Berlinois par sa naissance, Viennois par ses parents, Français par son éducation, citoyen des États-Unis par sa carrière universitaire et scientifique, le physiologiste Ernst Knobil est demeuré toute sa vie un exemple parfait de l'intellectuel européen – une culture polymorphe assortie d'humour, une ambition habillée d'élégance, une rigueur scientifique tempérée de pragmatisme et d'efficacité. Dans ce dernier registre, il a fortement contribué au développement de l’endocrinologie.

Né le 20 septembre 1926, Ernst Knobil grandit dans le Paris des années 1930, après que ses parents eurent été chassés d'Allemagne par la menace nazie. Il habite un appartement du boulevard Murat et fréquente l'école primaire du Parc des Princes. Il n'est pas très bon élève, mais se fait des camarades dont il conservera le souvenir et appartient à l'équipe de football avec laquelle il vivra ses premières mésaventures sportives. Son père travaille dans l'import-export pour une firme appartenant à un Russe Boris Niemptsoff, également exilé à Paris. À cette époque, Ernst Knobil bénéficie d'une aisance bourgeoise bien éloignée des difficultés financières qu'il connaîtra lors de ses études universitaires aux États-Unis. Pendant les vacances annuelles à La Bourboule, il découvre la campagne et le goût de la nature qui lui feront choisir plus tard le collège d'Agriculture à l'université Cornell. Élève du lycée Claude-Bernard, il poursuit ses études secondaires jusqu'à l'invasion de la France. Au moment d'accompagner ses parents dans leur fuite aux États-Unis, il manifeste violemment son désir de rester pour défendre son pays d'adoption. À l'école qu'il fréquente à New York, ses camarades le surnomment « Frenchy ». Il est soldat et termine la guerre comme sergent sans revendiquer un exploit guerrier digne de passer à la postérité.

Élève de Sam Léonard à l'université Cornell, Ernst Knobil obtient son Ph D en 1950. Il débute sa carrière de chercheur sous la direction de Roy Greep à Harvard où il exerce les fonctions d'assistant et de professeur associé de physiologie de 1953 à 1961. En 1961, il accède à la chaire « Mellon » de l'université de Pittsburgh où il dirige le département de physiologie pendant vingt ans avant d'accepter les fonctions de doyen de la prestigieuse école de médecine de l'université du Texas à Houston ; il y contribue au développement du département de physiologie.

Son œuvre scientifique est tout entière consacrée à l'endocrinologie et à la neuroendocrinologie des axes corticotrope (hormones corticosurrénaliennes), somatotrope (hormones de croissance) et gonadotrope (hormones sexuelles). Dans ce dernier domaine, sa contribution offre une des découvertes majeures de la physiologie du xxe siècle : la pulsatilité circhorale (environ 1 heure) de la libération de l'hormone hypothalamique gonadotrope. Il élucide l'organisation des différents niveaux de régulation et de rétrocontrôles hormonaux et nerveux intervenant lors du cycle menstruel chez la femme. Ces travaux ont été rendus possibles grâce à la création d'un Primate center à Pittsburgh qui a été et reste un des tout premiers laboratoires de recherche appliquée aux singes dans le monde. L'utilisation du « modèle rhésus » – qu'il a su imposer face au modèle ailleurs prévalent du rongeur – a permis la guérison de millions de femmes souffrant de stérilité liée à des troubles de l'ovulation.

Ernst Knobil a formé une cinquantaine d'élèves réputés, fidèles à la tradition du maître : une physiologie inspirée de Claude Bernard, c'est-à-dire soucieuse des niveaux hiérarchiques de régulation et d'une approche intégrée de la fonction étudiée. Ernst Knobil a été président de l'Endocrine[...]

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Écrit par

  • : professeur des Universités, praticien hospitalier à l'université de Paris-XI, directeur de l'Institut de neurobiologie Alfred-Fessard

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